Comptes rendus de lecture

Entrepreneuriat. Des logiques aux pratiques d’action, Michel Marchesnay, Publications de l’Université de Provence, 2017[Record]

  • Pierre-André Julien

…more information

  • Pierre-André Julien
    Professeur émérite, Université de Québec à Trois-Rivières

Généralement, une compilation d’articles ou autres écrits scientifiques, tous intéressants qu’ils soient quand nous les lisons à leur première publication, comporte les défauts de leur disparité de sujet et de certaines répétitions. Ceci s’explique du fait que l’auteur doit tenir compte des objectifs et des normes de chaque revue ou des besoins exprimés par l’éditeur tout en ne réinventant pas à chaque fois les concepts utilisés. Sans en être complètement exempt, le présent recueil a un avantage du fait que non seulement il part de différents concepts et de plusieurs pratiques liés aux microentreprises, tout en suivant une logique historique dans leur développement durant les dernières décennies. De même, il y ajoute des exemples provenant de la France tout en s’appliquant jusqu’à un certain point à d’autres territoires comme le Québec. De plus, il a une bonne portée pédagogique qui devrait être particulièrement utile aux lecteurs avides d’exemples et des liens à faire avec la théorie. Ce qui est fort intéressant pour tout chercheur en entrepreneuriat et même pour des intervenants en la matière pour comprendre l’évolution de ces entreprises tout en se mettant à jour dans ce domaine trop longtemps mis de côté parce qu’il apparaissait peu ou pas intéressant du point de vue tant théorique que pratique pour les sciences de gestion, sinon pour les investisseurs, notamment à cause de la forte volatilité de ces entreprises. Les textes sont divisés selon les deux parties du titre. Dans la première, le chapitre 1 s’arrête aux logiques pour mieux comprendre les entrepreneurs français du xixe siècle, logiques rapidement mises de côté par les économistes, car elles ne correspondaient pas à leurs théories, alors que pourtant, elles étaient particulièrement présentes dans les analyses d’Adam Smith. Ce qui a amené l’auteur à se référer aussi à d’autres analystes, tel le rôle central des entrepreneurs dans les entreprises que l’on retrouvait déjà chez Cantillon et Jean-Baptiste Say ; ce dernier, en particulier, les voyant en même temps comme des patrons, des gestionnaires, des pères pour leurs ouvriers et même des meneurs pour leur communauté. Comme on peut le voir dans le cas de Bapterosse qui a créé une dynastie fondée sur la logique patrimoniale et la dépendance des PME sous-traitantes, dynastie qui s’étiolera lentement avec la troisième et surtout la quatrième génération et son embourgeoisement, perdant ainsi l’esprit d’innovation qui avait présidé à son développement. Cas avec d’autres qui auraient créé l’exception française alors qu’on peut retrouver cette évolution des comportements à peu près partout, en particulier durant les siècles derniers, comme l’auteur le précise. Le chapitre 2 étend cette critique aux autres grandes entreprises en y ajoutant l’importance prise par les ingénieurs provenant des grandes écoles et ignorant les petites entreprises jusqu’à temps qu’on découvre les limites de leur bureaucratie et des rendements décroissants, ce qui a permis, après les crises de 1973 et de 1975, de réhabiliter la petite taille. Ce qui explique aussi que dans la recherche en management, les études françaises en entrepreneuriat aient pris beaucoup de retard comparé au travail notamment des Anglo-Saxons. Ces crises mettant à mal la croyance que l’emploi proviendrait avant tout des grandes entreprises. Ceci aboutira à de nouvelles analyses sur l’importance de l’innovation et de la flexibilité et sur la grande diversité des modèles gagnants, analyses réhabilitant en même temps cet entrepreneur au point de faire naître une nouvelle discipline en gestion à partir d’une meilleure connaissance de ces acteurs. Le troisième chapitre explique comment cette nouvelle discipline a évolué en se libérant graduellement des connaissances liées aux grandes entreprises et aux sciences économiques, tout en retenant certains concepts, telles les théories …