Compte renduBook Review

Richard Bégin, Myriam Dussault et Emmanuelle Dyotte (dir.), La circulation des images. Médiation des cultures, Paris, L’Harmattan, 2006, 214 p.[Record]

  • Philippe Théophanidis

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  • Philippe Théophanidis
    Université de Montréal

Depuis plusieurs années déjà, il est de pratique courante pour les sciences humaines de questionner l’efficace des repères que nous fabriquons et qui informent en retour nos manières d’être. Certains ont pu suggérer que ce discours s’élabore précisément à partir d’une transformation radicale des moyens par lesquels nous parvenons à mettre en forme nos expériences. Aussi, s’il peut sembler excessif d’évoquer la fin générale de la représentation, il demeure néanmoins pertinent d’interroger les variations que peuvent manifester les divers régimes représentatifs auxquels nous sommes exposés. En ce sens, le collectif publié récemment sous le titre La circulation des images  offre un double intérêt. D’une part, la plupart des textes qui le constituent donnent à penser des objets d’analyse dont le fonctionnement « problématise » le concept de représentation. D’autre part, cette publication est elle-même l’expression, lisible, de la forme et de l’orientation que peuvent adopter aujourd’hui certains discours institutionnels préoccupés par cette problématique. À partir du constat de la prolifération généralisée des « images  » et du rôle important qu’elles jouent dans l’organisation de nos expériences, les quatorze auteurs de ce collectif proposent l’analyse de divers objets, oeuvres ou phénomènes. Malgré la diversité des perspectives théoriques mobilisées, la plupart des textes partagent un certain nombre de points communs, exprimés tantôt explicitement comme postulats théoriques, tantôt comme cadre méthodologique, tantôt comme conclusion implicite. Toutes ces analyses tendent en effet à aborder l’image en questionnant l’idée générale d’une représentation dont le rôle consisterait essentiellement à rendre compte d’un référent normatif (compris comme « essentiel » ou « authentique »). Une volonté de comprendre autrement les possibilités créatrices liées à la « circulation des images » semble à l’oeuvre tant dans les objets abordés que dans la structure même des études qu’elles motivent. Dès lors, l’image ne s’étudie plus comme une unité autonome, mais bien comme l’émergence perceptible, temporairement stabilisée, d’un processus relationnel complexe rassemblant matériaux d’expression, moyens de production, gestes artistiques, regards spectatoriels, discours théoriques, etc. . Dans cette perspective, l’oeuvre et la communauté sont coproduites par les rapports qu’elles entretiennent. Il n’est donc pas étonnant que la « circulation des images » soit également associée à des effets de réel. Ce sont en définitive ces effets qui semblent intéresser, de façon générale, les auteurs réunis dans ce collectif. Je propose ici un survol rapide de chacun de ces textes en respectant l’ordre de présentation de l’édition qui les rassemble. Olivier Asselin propose en premier lieu un essai sur le phénomène d’autoreprésentation associé à la multiplication des sites amateurs offrant un accès à des webcams personnelles. L’auteur relève rapidement la problématique essentielle associée à ce type de spectacle. En effet, de manière générale, « ces sites ne donnent rien à voir » et la vie de ceux qui s’y donnent en représentation semble « sans événement heureux, ni malheureux, sans passé et sans avenir » (p. 11). Néanmoins, ces sites connaissent une popularité certaine. Asselin développe son essai sous la forme d’un triptyque interrogeant la nature des rapports ainsi médiatisés entre regardant et regardé. Un premier volet esquisse une critique de la spectacularisation des rapports sociaux. Un deuxième aborde rapidement le rôle du dispositif panoptique pour une société dite, avec Michel Foucault, « disciplinaire ». Un dernier volet, enfin, s’attarde sur le rôle des pulsions de désir et d’angoisse dans la mise en forme des relations entre voyeur et exhibitionniste par l’entremise de cet « ombilic technologique » (p. 18). L’argument principal de cet essai vise à souligner le développement d’une curieuse intimité qui relèverait moins d’une communication (comprise dans le sens restreint d’un processus d’échange) que d’une communion (p. 19). Asselin …

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