Recensions

Les espaces publics, la démocratie et les gauches en Amérique latine, sous la direction de Julián Durazo Herrmann, Québec, Presses de l’Université Laval, 2019, 254 p.[Notice]

  • Francis Therrien

…plus d’informations

  • Francis Therrien
    Étudiant en pédagogie de l’enseignement supérieur, Université du Québec à Montréal
    Détenteur d’une maîtrise en études médiatiques de l’Université d’Oslo
    therrien.francis.2@courrier.uqam.ca

Brossant un portrait de la situation politique de divers pays, principalement sud-américains, l’ouvrage dirigé par Julián Durazo Herrmann rassemble des textes de chercheur·es affilié·es autant dans des universités québécoises ou états-uniennes que latino-américaines. Au fil de ses huit chapitres, Les espaces publics, la démocratie et les gauches en Amérique latine couvre le territoire de six États nationaux sud-américains – Équateur, Venezuela, Brésil, Pérou, Bolivie et Argentine – ainsi que du Mexique, sur une période s’étendant de 1998 jusqu’à 2017. Certaines plumes ont préféré une approche comparative interétatique, alors que d’autres se sont intéressées aux dynamiques à l’intérieur d’un pays ou encore d’une division subnationale. Cette diversité d’approches enrichit la compréhension des lecteur·rices sur un espace public latino-américain « diversifié, hétérogène et en constant mouvement », « que ce soit à travers les mobilisations sociales et syndicales, les transformations de l’État, les politiques publiques ou les médias de communication » (Rose Chabot, Ximena Cuadra Montoya et Adriana Pozos Barcelata, p. 2). Pour ce faire, chaque chapitre repose sur des recherches empiriques. Ceux-ci abordent, dans une première partie, les transformations de l’espace public matériel, médiatique et politique. Cela inclut deux chapitres sur les conglomérats médiatiques, l’un en Équateur (Thomas Chiasson-LeBel, p. 21-47) et l’autre à Bahia au Brésil (Durazo Herrmann, p. 81-104), ainsi qu’un chapitre sur l’espace urbain au Venezuela (Alejandro Velasco, p. 49-79), qui fera l’objet d’une plus ample discussion dans les prochaines lignes. Ensuite, l’ouvrage se tourne vers les relations de pouvoir politico-économique qui agissent sur l’espace public. On y aborde l’effet de l’extractivisme sur la démocratie (Nancy Thede, p. 107-132) de manière comparative entre un régime néolibéral – le Pérou – et un régime post-néolibéral – la Bolivie –, puis l’économie du Brésil (Edison Rodrigues Barreto Jr, p. 133-158), chapitre sur lequel nous reviendrons également dans les prochaines lignes. Les derniers chapitres portent finalement sur les acteur·rices de l’espace public, notamment la société civile et les mouvements sociaux. Deux chapitres incluent l’Argentine, l’un y analysant la polarisation politique (Gabriel Vommaro, p. 191-212), l’autre comparant la recomposition des gauches et des mouvements syndicaux avec le Brésil (Thomas Collombat, p. 161-190). Le troisième chapitre est consacré aux mouvements sociaux, notamment aux luttes autochtones, dans l’État de Veracruz au Mexique (Martín Aguilar Sánchez, p. 213-235). Au terme de la lecture de ces chapitres, on peut constater le changement de dynamique depuis 1990 et observer la pluralité des espaces publics en Amérique latine. Certes, « [s]i, dans les années 1990 et 2000, les chercheurs étudiaient le virage à gauche en Amérique latine – ses causes, ses dynamiques et bien sûr ses retombées et conséquences –, en 2019, au moment de la publication de cet ouvrage, une nouvelle tendance semble apparaître, l’étude d’un virage encore difficile à nommer » (Charmain Levy, p. 237). La lecture attentive de chacun des chapitres permet toutefois d’également remarquer une faiblesse quant au fil conducteur de l’ouvrage. Au nom d’un « hommage à [la] complexité » de la notion d’espace public (Chabot, Cuadra Montoya et Pozos Barcelata, p. 3), on retrouve des thèmes qui peuvent apparaître plutôt disparates. Bien qu’informatifs, rigoureux et intéressants, les chapitres de Velasco et de Rodrigues Barreto Jr ont un peu l’effet de fausses notes dans une mélodie autrement harmonieuse. Le premier est davantage le résultat d’une recherche en études urbaines qui comprend l’espace public comme un synonyme d’espace urbain. Le passage suivant en est un bon exemple : « Alors que des espaces ostensiblement publics fermaient à l’ouest dans le cadre de la défense de la ville chaviste, de l’autre côté de Caracas, la place Sadel – de même que d’autres espaces publics tels …