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Drogues addictives, protéine phosphatases et voie ERKDrugs of abuse, protein phosphatases, and ERK pathway[Notice]

  • Emmanuel Valjent,
  • Denis Hervé et
  • Jean-Antoine Girault

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  • Emmanuel Valjent
    Laboratoire de Transduction du signal et plasticité dans le système nerveux,
    Inserm et Université Pierre et Marie Curie, U.536 ;
    Institut du Fer à Moulin,
    17, rue du Fer à Moulin,
    75005 Paris, France.

  • Denis Hervé
    Laboratoire de Transduction du signal et plasticité dans le système nerveux,
    Inserm et Université Pierre et Marie Curie, U.536 ;
    Institut du Fer à Moulin,
    17, rue du Fer à Moulin,
    75005 Paris, France.

  • Jean-Antoine Girault
    Laboratoire de Transduction du signal et plasticité dans le système nerveux,
    Inserm et Université Pierre et Marie Curie, U.536 ;
    Institut du Fer à Moulin,
    17, rue du Fer à Moulin,
    75005 Paris, France.
    girault@fer-a-moulin.inserm.fr

Les neurones dopaminergiques du tronc cérébral (substance noire compacte et aire tegmentale ventrale) sont peu nombreux mais jouent un rôle fondamental dans le contrôle de la motricité et de la motivation. Ils innervent le striatum, les régions limbiques et le cortex cérébral. Il a été montré récemment que les neurones dopaminergiques codent les erreurs de prédiction de récompense, un aspect essentiel des modèles d’apprentissage de réseaux neuronaux [1]. La transmission dopaminergique est la cible privilégiée des drogues toxicomanogènes qui ont toutes la propriété d’augmenter les concentrations de dopamine extracellulaire dans le striatum ventral ou noyau accumbens (NAcc) [2]. On pense actuellement que cette stimulation de la transmission dopaminergique par les drogues détourne les systèmes normaux d’apprentissage contrôlé par la récompense et « renforcent » les circuits activés lors de la prise de drogue [3]. Certains de ces circuits étant impliqués dans l’orientation du comportement (motivation), l’activation directe répétée de la transmission dopaminergique par des substances chimiques exogènes orienterait progressivement, de manière de plus en plus contraignante, l’activité de l’animal ou du sujet vers la prise de drogue. Une question majeure étudiée par de nombreux laboratoires porte sur les mécanismes moléculaires qui sous-tendent les actions durables de la dopamine et qui peuvent rendre compte de ces effets comportementaux complexes. On sait que la dopamine module la plasticité des synapses glutamatergiques corticostriatales, un des mécanismes centraux de l’apprentissage contrôlé par la récompense [3, 4]. Cela suggère que certaines voies de signalisation intracellulaire sont activées spécifiquement dans les neurones qui reçoivent à la fois une stimulation dopaminergique et une stimulation glutamatergique. Une des voies de signalisation dont le rôle est maintenant bien établi dans la plasticité synaptique dans des régions du cerveau comme l’hippocampe ou l’amygdale implique la MAP-kinase (mitogen-activated protein kinase) appelée ERK (extracellular signal-regulated kinase) [5]. Des données récentes soulignent l’importance de ERK dans l’action des drogues toxicomanogènes. L’administration d’une dose unique de cocaïne chez la souris entraîne dans les neurones du NAcc une augmentation transitoire de la double phosphorylation de ERK sur sa boucle d’activation, traduisant l’activation de cette enzyme [6]. L’activation de ERK dans le NAcc, ainsi que dans les noyaux de l’amygdale étendue et les couches profondes du cortex préfrontal, est aussi observée avec d’autres drogues toxicomanogènes (morphine, nicotine, amphétamine et δ-9-tétrahydrocannabinol, principal composé psychoactif du cannabis), alors que des substances psychotropes peu ou pas addictives (caféine, antidépresseurs, anti-psychotiques) n’ont pas cet effet [7]. Les effets des drogues toxicomanogènes impliquent notamment la stimulation des récepteurs D1 de la dopamine [3]. Les études par immunofluorescence ont permis de caractériser les neurones dans lesquels ERK est activée après injection d’amphétamine. L’augmentation de la forme phosphorylée de ERK n’est observée que dans une fraction des neurones épineux de taille moyenne qui expriment le récepteur D1, suggérant l’existence d’un deuxième signal requis pour l’activation de cette voie [8]. Ce deuxième signal semble être la stimulation des récepteurs de type NMDA (N-méthyl-D-aspartate) du glutamate [6, 8]. Ainsi, la phosphorylation de ERK dans les neurones épineux du striatum se comporterait comme un détecteur de coïncidence, nécessitant la stimulation concomitante des récepteurs D1 de la dopamine et NMDA du glutamate [8]. Dans un travail récent, nous avons clarifié le mécanisme par lequel la dopamine contrôle l’activation de ERK dans les neurones épineux du striatum en réponse aux drogues toxicomanogènes [8]. Ce mécanisme implique l’inhibition de la protéine phosphatase 1 (PP1) par une protéine clé de la signalisation dopaminergique dans le striatum, la DARPP-32 (dopamine- and cAMP-regulated phosphoprotein, Mr 32,000) [8, 9]. Lorsqu’elle est phosphorylée sur la thréonine 34 par la protéine kinase activée par l’AMP cyclique, en réponse …

Parties annexes