Ils étaient au moins 28 espèces différentes de grands carnivores appartenant à la famille des Canidae, les Hesperocyoninae et les Borophaginae, qui cohabitaient il y a 30 millions d’années (MA). Ils ont disparu aujourd’hui et ont été remplacés par des carnivores plus petits, dont la lignée qui a conduit à l’unique espèce de chien moderne [1]. Les raisons de l’extinction d’une espèce sont souvent plus difficiles à déchiffrer que celles de son expansion, souvent associées à une sélection lui permettant une meilleure adaptation aux variations écologiques. La richesse en fossiles canins de l’Amérique du Nord a permis à une équipe californienne [1] de déduire, à partir d’indices morphométriques (sur les dents et les os du maxillaire), la taille et le type d’alimentation de ces deux sous-familles et d’élaborer une hypothèse : la nature de leur succès a aussi fait leur perte ! Dans ces deux sous-familles, on note en effet une augmentation de la masse corporelle avec le temps (400 % sur 25 MA pour les Hesperocyoninae et 600 % sur 35 MA pour les Borophaginae). Cette augmentation de la taille de certains mammifères au cours de l’évolution avait déjà été mise en évidence il y a une centaine d’années par un paléontologue, Edwin Cope. Décrite depuis lors pour plusieurs autres espèces comme le cheval, cette observation est désormais connue sous le terme de « loi de Cope ». Mais l’équipe de B. Van Valkenburg est allée plus loin et a pu observer qu’en devenant plus grandes, ces espèces de chiens ont évolué vers un régime de plus en plus carné. Or, une estimation a permis d’indiquer que les espèces hypercarnivores n’ont pas persisté plus de 6 MA alors que les espèces omnivores, au régime plus équilibré, ont perduré environ 11 MA. Bien sûr, l’augmentation de la taille des animaux a permis à ces grands toutous d’éviter plus de prédateurs et d’attraper plus facilement leurs proies. Sans doute aussi a-t-elle permis d’augmenter leurs chances de succès reproductifs et d’éliminer les compétiteurs plus petits. Mais ce processus évolutif de spécialisation vers un régime exclusivement carné étant difficilement réversible, il les a également rendus plus fragiles et plus sensibles aux modifications environnementales et donc à l’extinction. Moralité : Jean de La Fontaine, dans ses fables, n’avait pas pris en compte l’évolution. Prognathe, de grosses arcades sourcilières, une charpente massive, un cerveau plus volumineux que le nôtre, l’homme de Néandertal n’inspirait pas confiance ! Arrivé en Europe il y a 150 000 ans, il cohabita avec l’homme de Cro-Magnon avant de disparaître il y a environ 25 000 ans. On disait sa culture (Moustérienne) plus rustre que celle de l’homme moderne (Aurignacienne) qui, noblesse oblige, fut celle de l’art des cavernes et de la révolution du paléolithique supérieur. Ça n’est pourtant pas la conclusion à laquelle sont parvenus quelques-uns des scientifiques qui se sont réunis en août dernier au troisième congrès sur les origines de l’homme à Gibraltar, lieu de la découverte du premier spécimen néandertalien en 1848 [3]. Il semblerait en effet que l’homme de Néandertal n’ait pas été tellement mieux adapté que l’homme moderne au froid qui régnait à cette époque. Par ailleurs, même si les aiguilles à coudre sont apparues depuis moins de 25 000 ans, l’homme de Néandertal aurait pu utiliser des os taillés pour faire des trous dans les peaux qu’il savait travailler. Il était alors vraisemblablement en compétition avec l’homme de Cro-Magnon dans ce domaine. Pour la plupart des archéologues, l’acculturation des Néandertaliens se serait faite en copiant les techniques de l’homme moderne. Pour certains autres au contraire, Néandertal et l’homme moderne se seraient …
Parties annexes
Références
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