Comptes rendus bibliographiques

PROULX, Marc-Urbain (2019) Splendeurs, misères et ressorts des régions. Vers un nouveau cycle de développement régional. Presses de l’Université du Québec, 272 p. (ISBN 978-2-7605-5188-6)[Notice]

  • René Kahn

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  • René Kahn
    Université de Strasbourg

Le titre de l’ouvrage ne reflète pas le contenu auquel un lecteur européen pouvait a priori s’attendre, c’est-à-dire un propos universel et des analyses de portée plus large sur la gouvernance des régions en général. De façon analogue, le développement régional lui-même n’est pas strictement défini ; il est appréhendé principalement par l’urbanisation, la croissance démographique, l’importance et la variété des activités économiques. Mais, passé ce premier effet de surprise, nous avons découvert dans le livre de Marc-Urbain Proulx un formidable exposé sur la dynamique territoriale régionale et municipale au Québec, un diagnostic exhaustif fondé sur une connaissance historique approfondie, sur de multiples observations empiriques, notamment statistiques, relayées par des schémas et une cartographie riche et pédagogique. On y trouve également un ensemble de propositions pour relancer à bon escient, et dans un esprit d’intérêt collectif, le développement des régions périphériques du Québec sur des bases nouvelles (de transition, d’innovation, de résilience). Nous y avons trouvé une vision aussi précise que globale du développement géoéconomique québécois, avec les principes directeurs de sa prise en main territoriale. Certes, quelques thèmes généraux sont traités, comme la planification territoriale, le processus territorialisé de l’innovation, les clusters et leurs effets de proximité, mais l’ouvrage est consacré en priorité aux régions et municipalités régionales de comté (MRC) du Québec. Le lecteur comprend alors que, même s’il existe des principes et des modèles de développement généralisables, le développement régional est toujours contextualisé. Des idées maîtresses et des axes de réflexion structurent l’ouvrage : la démographie comme principal indicateur de développement, l’idée de freins et de leviers au développement ou encore l’animation, la concertation et le partenariat comme fils directeurs. Chacun des 17 chapitres déploie son lot de données institutionnelles et historiques, de concepts empiriques et théoriques, d’analyses nuancées, de sorte qu’il n’est pas aisé d’en donner un résumé. Nous nous en tiendrons à quelques constats forts, traversés par une question centrale : comment concevoir et organiser le développement territorial, avec quels schémas stratégiques, quels outils, quelles pratiques, quelles institutions, quels degrés de décentralisation et de coordination ? Ce sont les régions et les MRC qui seront le fer de lance du redéveloppement. Cependant, plusieurs conceptions de l’appropriation territoriale s’affrontent, en particulier celle du développement communautaire (proche du développement local en Europe) et celle plus strictement économique, entrepreneuriale et industrielle, à dominante urbaine, davantage prisée par les milieux d’affaires. L’accent est mis sur les nombreux acteurs qui opèrent aux côtés des entreprises. L’auteur s’appuie sur une connaissance patiemment accumulée des lieux, des espaces, des ressources, des organisations et des stratégies. Au Québec, les institutions de médiation en charge du développement territorial ont été, dans un premier temps, centralisées, caractérisées par des relations verticales (Office de planification et de développement du Québec – ODPQ – 1968-1992, ministère des Régions) avant d’être déconcentrées (bureaux multifonctionnels de Services Québec, commissaires industriels, sous-ministres adjoints en région, délégués régionaux) puis décentralisées (gouvernements régionaux). L’auteur évalue les acquis et les limites de chacun de ces dispositifs. Un ouvrage de ce type est extrêmement précieux, car il rassemble, sur un vaste territoire qui a sa cohérence géographique, économique et politique propre, une somme considérable de connaissances et d’expériences en géographie économique (la localisation des activités) et en économie géographique (la dynamique spatiale). L’auteur a rassemblé des analyses et des travaux qui portent principalement sur la dynamique urbaine du Québec et sur les mécanismes de développement des régions périphériques. L’introduction rappelle à juste titre le caractère polysémique du concept de région et les différentes typologies qui s’efforcent de lui donner une consistance en sciences sociales et en économie régionale. L’ouvrage est centré sur les 15 …

Parties annexes