Abstracts
Résumé
Cet article entend montrer comment s’exprime, dans l’écriture du témoignage, une forme de « réalisme traumatique ». À la lumière d’une étude précise de certains passages des Mémoires de Ruth Klüger, Weiter leben [Refus de témoigner] et de la trilogie de Charlotte Delbo, Auschwitz et après, nous verrons comment chaque auteur tisse des liens entre l’extrême et l’ordinaire afin de représenter l’« univers concentrationnaire » nazi. Au surplus, les textes de Klüger et de Delbo offrent des matériaux à une entreprise critique s’inscrivant dans la mouvance des théories récentes du trauma, dont l’influence est considérable dans le champ des études culturelles ou littéraires. Alors que certains théoriciens envisagent la catégorie du trauma d’un point de vue totalisant et homogénéisant, les textes examinés ici nous invitent à penser la violence traumatique sous un angle différent. Ils permettent également de saisir la portée politique du témoignage et d’approfondir notre connaissance de la violence extrême tout en favorisant une meilleure reconnaissance sociale du contexte social post-traumatique.
Abstract
This essay develops an account of testimony as a form of “traumatic realism.” Based on close analysis of passages in Ruth Klüger’s memoir Weiter leben [Landscapes of memory] and Charlotte Delbo’s trilogy Auschwitz et après [Auschwitz and after] the essay reveals how each author interweaves the extreme and the everyday in order to portray the “concentrationary universe” of the Nazi camps. In addition, the texts of Klüger and Delbo provide resources for a critical engagement with influential recent theories of trauma in literary and cultural studies. While some theorists risk absolutizing and homogenizing the category of trauma, the texts discussed here help us to develop a differentiated account of traumatic violence. They also help us to reflect on the political impact of testimony. Traumatic realist texts, such as those by Klüger and Delbo, simultaneously produce knowledge of extreme violence and prompt public recognition of a post-traumatic social context.