Comptes rendus

Julien Massicotte (dir.), Saisir le présent, penser l’avenir. Réflexions sur l’Acadie contemporaine, Québec, Presses de l’Université Laval, 2021, 129 p.[Record]

  • Mathieu Wade

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Les textes qui composent l’ouvrage dirigé par le sociologue Julien Massicotte sont issus d’un colloque tenu à Edmundston dans le cadre du Congrès mondial acadien de 2014. Le collectif se compose de six courts textes et d’une introduction par Massicotte. D’entrée de jeu, il faut constater l’ambition de ce livre, qui propose de « saisir le présent » et de « penser l’avenir ». Si l’on doit juger l’ouvrage à l’aune de cette ambition, il n’est pas certain que le pari soit tenu. Premièrement, au-delà d’une volonté plutôt vague de saisir le présent et de penser l’avenir, on ne sent pas que le collectif est organisé autour d’une question ou d’une proposition commune forte. La proposition était suffisamment vague pour que chacun l’aborde à sa guise. Il en ressort un assemblage par moment hétéroclite. Deuxièmement, les contributions ne sont pas suffisamment pluridisciplinaires pour réellement réaliser l’ambition de l’ouvrage. Puisant essentiellement dans l’histoire et la sociologie, il s’en dégage un portrait limité de l’état de l’Acadie. Si l’ouvrage pris dans son ensemble n’est pas tout à fait à la hauteur de son ambition affichée, qu’en est-il des contributions prises individuellement? L’introduction de Massicotte réussit en quelques pages à mettre le doigt sur les défis qui touchent à la projection de l’Acadie dans l’avenir. L’élément le plus novateur de cette introduction est la chronologie qu’il propose du dernier siècle acadien. Du « catholicisme social des années 1930 et 1940 » aux « idéologies révolutionnaires des années 1970 » et à « l’approche légaliste à la question linguistique » (p. 2), cette chronologie pose en quelques lignes des jalons incontournables pour penser la trajectoire de l’Acadie. Le premier chapitre, de Gérard Bouchard, propose une analyse du processus par lequel les mythes ont contribué à produire et à reproduire une identité acadienne. Il s’agit du texte le plus faible du collectif. Ne s’appuyant sur aucune référence, le texte demeure trop général et s’arrime assez mal aux autres chapitres. Les trois chapitres suivants forment un ensemble plus cohérent. Ils abordent la question du présent et de l’avenir à partir d’analyses du pouvoir politique qu’exerce la société acadienne au sein de son milieu associatif. Le chapitre d’Éric Forgues sur la gouvernance communautaire en Acadie du Nouveau-Brunswick présente un bilan critique du milieu associatif et de sa relation de dépendance vis-à-vis du gouvernement fédéral. Reprenant des analyses qu’il a produites ailleurs, il conclut que « le modèle de financement actuel maintient une forme de précarité et d’incertitude du côté des organismes francophones, ce qui les conduit à se comporter comme des organisations plutôt que des institutions. Dans le cadre d’une telle dépendance administrative et financière vis-à-vis le gouvernement canadien, l’institutionnalisation de l’action collective francophone et acadienne est difficilement réalisable » (p. 41). Le chapitre d’André Magord s’intéresse à l’enjeu du maintien d’une singularité acadienne dans un contexte de globalisation néolibérale. Il propose une synthèse des travaux des dernières années et plaide pour une meilleure prise en compte des enjeux socioéconomiques en Acadie, ainsi qu’une plus grande autonomie institutionnelle. Sylvie Morin, quant à elle, porte un double regard d’universitaire et de militante au sein du Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick. Elle apporte une perspective éclairante sur le fonctionnement du milieu associatif et sur le rapport problématique au passé. Elle s’intéresse aux diverses manières dont le passé informe ou non l’action des organismes dans le présent et retrace, ce faisant, les grands jalons du mouvement féministe en Acadie depuis la Révolution tranquille. Les deux derniers chapitres de l’ouvrage portent quant à eux sur l’influence du Parti acadien sur la société acadienne dans les années 1970. Le chapitre de Michael Poplyansky …