Hommage à Andrée Fortin

Hommage à Andrée Fortin[Record]

  • Sylvie Lacombe

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Notre collègue et amie Andrée Fortin est décédée le 9 janvier dernier des suites d’un cancer qu’elle combattait depuis deux ans. Son départ a laissé un grand vide au département de sociologie de l’Université Laval et surtout à Recherches sociographiques, institution qu’elle a littéralement incarnée pendant de nombreuses années. Tout.e.s ses collègues ont apprécié sa force tranquille, son esprit vif, sa bonté et son sens de l’humour. Avec 31 ans de loyaux services à l’Université Laval, Andrée a été un pilier du département de sociologie par la grande quantité d’étudiant.e.s qu’elle a dirigé.e.s et celles et ceux qu’elle a encadré.e.s à travers sa participation à divers comités (d’évaluation de mémoire, jurys d’examen de synthèse, jurys de projet de thèse, jurys de soutenance). Pilier également pour avoir donné pendant 13 années le Laboratoire de recherche, ce fameux cours de 1e cycle très exigeant, initiant à la recherche empirique, qui valait à lui seul l’équivalent de quatre cours réguliers, s’étalait sur deux sessions et dont le département avait fait sa marque de commerce, sa distinction. Mais pilier du département également par sa production scientifique, aussi prolifique que diversifiée. Ses nombreuses subventions ont impliqué un nombre imposant d’étudiant.e.s dans ses propres travaux, à qui elle transmettait le plaisir de la recherche. Dans le milieu des études québécoises et en sociologie de la culture, elle était souvent demandée comme prélectrice de thèse – son oeil de lynx étant réputé pour ne rien laisser passer des coquilles ni des conclusions à tirer d’un corpus de données quelconque. Sauf exception, Andrée n’était jamais là pour personne… le matin. En grande intellectuelle, elle consacrait cette période de la journée à écrire, et ces moments d’écriture avaient quelque chose de sacré. Sa production scientifique est d’ailleurs exceptionnelle (pour le détail, on consultera l’In memoriam de Simon Langlois dans ce segment) et plusieurs collègues, manifestement impressionnés et peut-être un peu jaloux, se demandaient, mais enfin comment fait-elle pour écrire autant et si bien? Andrée vouait un attachement particulier, voire une passion, aux revues scientifiques francophones du Québec, comme le montre brillamment Jean-Philippe Warren dans ce même segment; et avait une affection toute spéciale pour Recherches sociographiques. Elle est entrée au comité de rédaction de notre revue en 1989, à compter du volume 30; est devenue rédactrice en 1993 au volume 34 et est restée aux commandes pendant 12 années. Simon Langlois l’a remplacée en 2005, assurant la publication de 8 ou 9 numéros. En 2008, elle a dirigé avec Richard Marcoux le numéro thématique sur la ville de Québec, l’année du 400e anniversaire de sa fondation (vol. 49, no 1). Elle est ensuite redevenue rédactrice de 2011 à 2013, année où elle a pris sa retraite. Pas étonnant que dans l’esprit d’un grand nombre de chercheur.e.s, Recherches sociographiques, c’était Andrée Fortin. C’est donc avec beaucoup d’émotion que nous consacrons un segment de ce numéro à lui rendre hommage. Outre la remémoration de sa carrière universitaire par S. Langlois et un essai de J.-Ph. Warren sur la contribution scientifique de son oeuvre, nous y avons adjoint la republication du chapitre 18 de son livre sur les revues québécoises (2e édition, 2006), « Passage du millénaire. Un pluralisme incertain », afin de redonner une certaine visibilité à ses écrits.