Des pratiques à notre image

Exclusion sociale et perspectives d’intervention : la recherche de sens[Record]

  • Joscelyne Levesque

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  • Joscelyne Levesque, mss
    École de service social, Université d’Ottawa

Les lignes qui suivent se veulent une réflexion axée sur la recherche de sens en liens directs avec mon rôle professionnel comme intervenante dans une société cherchant à redéfinir son projet collectif pour le bien commun de l’ensemble de ses citoyennes et de ses citoyens. À partir d’expériences personnelles et professionnelles, je tenterai d’illustrer mon parcours comme individu membre d’une collectivité en reconstruction. Le choix de partir de mon expérience de vie comme postulat de base à cet article s’explique par le fait que je suis professionnellement le reflet de ce que je suis personnellement : mes valeurs, mes croyances, ma vision du monde sont les fondements de mes actions professionnelles. J’espère qu’à la lecture des lignes qui suivent vous pourrez faire un parallèle avec ce que nous vivons collectivement depuis les vingt dernières années, car je crois, bien humblement, que mes questionnements personnels et professionnels sont le reflet de notre société actuelle. Je souhaite que vous aussi décidiez d’apporter votre contribution dans cette redéfinition de nos valeurs collectives. La première question/réflexion qu’a suscitée chez moi la préparation de cet article, a été depuis quand et comment la nécessité de me sentir engagée socialement m’est devenue aussi vitale que de respirer? Dès mes premières années à l’école primaire, les injustices sociales et toutes les formes d’exclusion me heurtaient profondément : pauvreté économique, différences raciales ou de religion, opinions différentes, etc. Je ne comprenais pas qu’on puisse infliger des regards empreints de mépris à des gens, des enfants souvent démunis face à de telles attitudes de rejet. La souffrance des autres m’a toujours touchée et le mépris, choquée, mise en colère! Je n’acceptais et n’accepte toujours pas, qu’on puisse juger sans connaître l’autre, sans l’écouter et sans accueillir sa différence. Afin de sortir de cette impuissance et cette colère, je me suis engagée activement dans différentes formes de bénévolat : conseil de classe, brigadière scolaire, journal scolaire, etc., là où je pouvais dénoncer toute forme d’injustice sociale. Cette implication s’est poursuivie tout au long de ma vie professionnelle. Cette sensibilité et cette colère face aux injustices m’ont amenée à compléter une formation collégiale en travail social axée sur le changement social. Nous sommes ici à la fin des années soixante-dix, dans un contexte social où sont mises de l’avant les valeurs d’équité sociale, de justice sociale et d’égalité de droit. Le programme visait à former des animatrices et des animateurs sociaux pour accompagner les citoyennes et les citoyens dans la revendication de leurs droits sociopolitiques et économiques par la transformation sociale en favorisant une répartition plus équitable des richesses individuelles. Quelle formation! Enfin, on me donnait des outils pouvant susciter des changements sociaux profonds favorisant une société plus juste, plus équitable, donc plus inclusive. Premier emploi, premier choc professionnel! J’ai vingt ans, j’ai confiance que mes habiletés professionnelles contribueront à la création d’une société plus juste, plus équitable pour toutes et tous! Forte de cet idéal, je me retrouve devant un « case load » de jeunes, dont plusieurs ont près de mon âge, placés en famille d’accueil, au sein d’une organisation de travail prônant le contrôle social et non le changement social. Trois ans à essayer d’influencer mon organisation, à claquer les portes des réunions où nous discutions « de cas », où nous affirmions nos expertises « socialisantes » sinon « culpabilisantes » pour les familles, où nous posions un regard élitiste sur des situations sociales souvent fort difficiles, empreintes de souffrance et d’impuissance. Et le cycle de mes questions recommence : Pourquoi des enfants, des parents, des familles se retrouvent dans de telles situations? Comment en sont-ils arrivés …

Appendices