Recensions

L’environnement politique de la santé, de Nicole F. Bernier, Québec, Presses de l’Université Laval, 2011, 192 p.[Record]

  • Learry Gagné

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Plusieurs ouvrages critiques des politiques contemporaines de santé ont été publiés ces dernières années sur des sujets chauds comme la privatisation, le manque de ressources ou les crises de financement. Peu d’entre eux toutefois nous montrent une vue d’ensemble du système de santé canadien. C’est ce à quoi on s’attendait avec le livre de Nicole F. Bernier, L’environnement politique de la santé. On y trouve effectivement une description du système de santé, mais, malgré son titre, ce n’est pas le but premier de l’ouvrage. Celui-ci porte plutôt sur les façons d’aborder les problématiques en politique publique et se veut un ouvrage destiné avant tout aux chercheurs débutants en science politique. En partant, la structure de l’ouvrage n’est pas classique. On peut le découper en deux parties : le système de santé canadien (chap. 1 à 3) et une méthodologie de recherche en politique publique (chap. 4 à 7). L’auteure justifie ses choix comme suit en introduction : « j’ai voulu fournir un ancrage concret – le système de santé et les politiques de santé – à partir duquel introduire des connaissances de base sur le fonctionnement du système politique, les mécanismes de prise de décision, les concepts théoriques et les approches méthodologiques pour analyser les politiques publiques » (p. 2). Il n’empêche que nous avons nettement l’impression d’avoir deux monographies en main. Le lien entre les deux n’est pas du tout évident. Si, effectivement, la description du système de santé devait servir d’application (si l’on peut interpréter « ancrage » ainsi) à une méthodologie de recherche des politiques publiques, n’aurait-il pas été préférable d’inverser l’ordre de ces deux parties et, surtout, de retenir un titre du genre « Analyse des politiques publiques : le cas de la santé » ? Quoi qu’il en soit, portons maintenant notre attention sur le contenu de l’ouvrage. Le premier chapitre est consacré à une description des systèmes politiques canadien et québécois. On y trouve des considérations théoriques sur les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, mais l’auteure insiste surtout sur ce qu’on pourrait appeler l’« appareil d’État », entendu ici comme les organigrammes des ministères et les relations d’autorité entre les groupes avec l’accent mis sur le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Cette approche concrète et bien vulgarisée en fait à mon avis une très bonne introduction au système de santé. On relèvera toutefois une lacune, ou peut-être une occasion manquée étant donné l’actualité, concernant le « pouvoir de dépenser » du fédéral, dont l’élaboration est beaucoup trop brève (p. 28). Les chapitres 2 et 3 sont consacrés au système canadien de santé, avec une attention particulière au système québécois. Le choix du Québec ne doit pas être vu comme restrictif, car au niveau de généralité de l’ouvrage, les systèmes provinciaux se ressemblent beaucoup. Pour l’analyse du système dans sa globalité, l’auteure a recours à la notion de health care state de Michael Moran qui distingue l’aspect social des services de santé et des effets redistributifs vers les plus démunis, l’aspect économique du système de santé comme créateur d’emplois et de richesse, et l’aspect politique où se façonnent les compromis (p. 40-53). Après une classification de l’État providence canadien selon la grille classique d’Esping-Anderson (p. 58-64), l’auteure en vient finalement à la description proprement dite du système canadien, qui fait six pages (p. 64-70). Elle mentionne succinctement les cinq éléments clés du système : la séparation des pouvoirs en 1867, la Loi canadienne sur la santé, la réforme des transferts fédéral-provincial de 1996, celle des années 2000, et le jugement Chaoulli ouvrant la porte au privé dans le système …