Recensions

Décentralisation, politiques publiques et relations de pouvoir, de Vincent Lemieux, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2001, 204 p.[Record]

  • Sylvain Vézina

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  • Sylvain Vézina
    Université de Moncton

Le but poursuivi par Vincent Lemieux dans cet ouvrage paraît à première vue fort ambitieux. Il y est question d’énoncer un début de théorie politique universelle de la décentralisation par la formulation de vingt-deux hypothèses autour de quatre propositions de recherche. Compte tenu de la notoriété de l’auteur, de l’étendue de sa production intellectuelle et de la rigueur dont il fait habituellement preuve dans ses travaux, le lecteur acceptera volontiers de s’engager dans la démarche scientifique proposée. Ce qui ressort, dès la lecture de la première partie du livre, c’est qu’il se présente comme un exercice de synthèse des nombreux travaux réalisés par l’auteur en cours de carrière, depuis les vingt dernières années en particulier. Les principales notions contenues dans ce texte (décentralisation, relations de pouvoir, politiques publiques, coalitions), les typologies et les modalités ont pour la plupart déjà fait l’objet d’études publiées par l’auteur. La méthode présentée en annexe en vue d’une formalisation des relations de pouvoir dans les politiques publiques résulte d’un cheminement initié, à notre connaissance, par des recherches menées au cours des années 1970 sur les réseaux sociaux, donnant lieu à la production d’un petit ouvrage intitulé Réseaux et appareil (1982) et se précisant dans un cahier intitulé Éléments d’une théorie politiques des voix (1992), pour aboutir à ce qui nous est ici proposé. Ainsi, toute personne désirant s’initier à l’oeuvre de V. Lemieux trouvera dans ce texte non seulement l’essentiel des questions le préoccupant et des outils qu’il nous propose pour leur traitement mais également l’articulation des nombreux concepts que suppose une tentative de formalisation théorique des relations de pouvoir dans les politiques de décentralisation. L’intérêt de cette parution s’en trouve de ce fait assuré. Fidèle à ses habitudes scientifiques, V. Lemieux se fait très systématique dans sa présentation. Partant du postulat selon lequel les acteurs cherchent à occuper les positions de pouvoir les plus avantageuses dans les politiques de décentralisation tenant compte des ressources qu’ils maîtrisent à un moment du processus, il développera quatre propositions de recherche. La première porte sur les enjeux entourant les politiques de centra-décentralisation et propose que les chances de voir les transferts compris dans une politique de décentralisation s’accroissent à mesure que s’étend le pouvoir des acteurs non gouvernementaux. La seconde traite du rapport centre-périphérie et suggère que le pouvoir exercé par les acteurs de la périphérie dans le déroulement d’une politique de décentralisation variera selon la décentralisation existante. La troisième proposition énonce que plus une coalition comprendra d’acteurs en position de pouvoir favorable, plus elle aura de chances d’exercer un contrôle sur les enjeux. Enfin, l’auteur présume, dans une quatrième proposition, que la légitimation du pouvoir des acteurs responsables d’une politique de décentralisation est d’autant plus simple que leurs atouts se fondent sur des valeurs plausibles et peu contestables. Ces propositions de recherche sont mises à l’épreuve dans douze cas différents de politiques de décentralisation réparties en quatre types : la décentralisation administrative (déconcentration), la décentralisation fonctionnelle (délégation), la décentralisation politique (dévolution) et la décentralisation structurelle (privatisation). Cet exercice aboutit à terme à la formulation de vingt-deux hypothèses constitutives de la théorie politique de la décentralisation que cherche à élaborer l’auteur. Les hypothèses énoncées sont variables à la fois par la nature du domaine concerné et par leur importance. Nous relèverons, en guise d’exemple, quatre d’entre elles qui, à défaut d’être parfaitement représentatives de l’ensemble, ont pour mérite d’illustrer le type de propositions auxquelles en arrive l’auteur. Ainsi, deux hypothèses (la troisième et la quatrième) stipulent que les sources formelles du pouvoir des acteurs sont nécessaires mais insuffisantes. Elles doivent être complétées par des sources plus informelles (information, …