Recensions

Laurent de Villeroché, L’Église fait l’Eucharistie, l’Eucharistie aussi fait l’Église. Un paradoxe en sacramentaire. Paris, Les Éditions du Cerf (coll. « Cogitatio Fidei », 313), 2021, 565 p.[Record]

  • Brian Almeida

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  • Brian Almeida
    Université Laval, Québec

Cet ouvrage exhaustif concerne l’adage d’Henri de Lubac : « L’Église fait l’Eucharistie, l’Eucharistie fait aussi l’Église ». Résultant d’une recherche doctorale, ce livre a été rédigé par Laurent de Villeroché, théologien membre du Service national de la pastorale liturgique et sacramentelle, et enseignant en théologie sacramentaire et pastorale sacramentelle à l’Institut Catholique de Paris. S’adressant à toutes personnes désireuses d’étudier l’importance et l’appropriation ultérieure de cette formule lubacienne, l’oeuvre nous permet de voir la façon dont le paradoxe s’utilise comme approche méthodique d’une théologie sacramentaire fondamentale. Cette démarche paradoxale vient en fait engager l’intelligence des chrétiens à poser comme point de départ réflexif l’approfondissement mutuel de l’Eucharistie et de l’Église. L’auteur veut resituer l’adage, parfois réduit à l’un ou l’autre de ses membres, dans le contexte du corpus lubacien afin d’apercevoir une pensée théologique plus large et complexe. Nous trouvons d’ailleurs plusieurs sources secondaires autour des thèmes de la théologie sacramentaire, le Mystère, l’Église et l’Eucharistie. Les références sont majoritairement issues du monde catholique francophone et anglophone, avec quelques références germanophones. Le premier chapitre de cet ouvrage traite la façon dont cet adage devenu passe-partout doit être resitué dans son contexte originaire pour reconnaître l’importance de ce que Lubac nomme l’aspect historique et social du « Mystère ». Le second chapitre propose la paradoxalité comme mode d’appréhension d’une théologie fondamentale, cherchant une nouvelle intelligence de la foi pour consentir à ce « Mystère ». Les chapitres trois et quatre illustrent l’appropriation de la formule lors de la période du concile Vatican II et de la période postconciliaire. Les chapitres cinq à sept, quant à eux, stipulent l’importance de concevoir l’action sacramentelle dans l’interaction des « faires » de l’adage. C’est en fait cette interaction qui permettrait d’encourager un entendement plus profond de l’efficacité et de la causalité sacramentelle dans ce que l’auteur nomme « l’économie du Mystère ». Dans l’ensemble, la démarche de l’auteur se pose comme un dévoilement des contingences rattachées à un adage auquel nous ne devrions aucunement amoindrir la complexité ni l’importance. L’auteur demeure prudent dans ces propos quant à l’interprétation des documents cités, illustrant d’ailleurs une riche pensée intertextuelle. La réflexion développée par l’auteur s’organise autour d’une ligne directrice pertinente. Nous témoignons depuis un certain temps que « les actes sacramentels vécus par les pratiquants occasionnels restent le plus souvent sans lendemain et ne renforcent pas le lien avec la communauté ». L’insistance du Concile sur « l’efficacité des sacrements considérée à partir de leur effet ecclésial » peine à s’imposer et vient caractériser une déception actuelle sur le terrain pastoral. La réception des orientations conciliaires promulgue encore « une vision superficielle des réalités sacramentelles ». Nous avons actuellement le défi de penser l’effet des sacrements à partir de la vie des croyants. C’est un souci caractéristique de la théologie du 20e siècle. Des théologiens comme Casel, Rahner, Schillebeeckx et Chauvet reconnaissent cette difficulté par le problème de la médiation. Nous rencontrons encore la difficulté de constater les contingences historiques, langagières, pratiques et relationnelles constituant nos théologies. Le but est de promouvoir un nouvel entendement rationnel des sacrements pour repenser l’efficacité dans notre contexte contemporain. Nous devons retrouver l’unité entre vie sacramentelle et existence chrétienne afin d’entrevoir la signification des sacrements pour nous, ici et maintenant. Nous devenons ainsi témoins d’une « rethéologisation » d’une « théologie sacramentaire en transition ». Le concile Vatican II fait également écho aux théologiens et théologiennes du 20e siècle quant au souhait d’inscrire une meilleure vie sacramentelle dans la vie chrétienne. Repenser et unir la théologie sacramentaire dans une perspective liturgique à valeur pastorale, relatée au mystère …

Appendices