Recensions

Thomas De Koninck, Philosophie de l’éducation pour l’avenir. Québec, Les Presses de l’Université Laval (coll. « Kairos », série « Essais »), 2010, xii-230 p.[Record]

  • Nestor Turcotte

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  • Nestor Turcotte
    Matane

L’éducation est, depuis toujours, au centre des débats humains. Jamais sans doute n’est-elle cependant apparue aussi problématique qu’aujourd’hui. Ce livre — ou ce cours — se découpe en treize leçons rédigées en un style direct et entend tirer profit des savoirs nouveaux, des immenses richesses héritées de la tradition, afin de dégager des éléments de solution aux problèmes posés aux éducateurs contemporains. La première leçon s’organise autour de deux thèmes principaux : le premier porte sur le rôle de la philosophie, à savoir éveiller les endormis de la cité, et le second, sur l’urgence de la philosophie de l’éducation face à la crise actuelle. L’A. présente, par la suite, l’enjeu de l’éducation qui n’est autre que le bonheur lui-même. L’éducation doit donner un sens à la vie de chacun, permettre à tous de s’élever vers une vie proprement humaine. D’où le rôle de l’affectivité dans le monde de l’éducation. L’affectivité est, à vrai dire, ce qui donne de la couleur à l’aventure humaine, suscite les différentes expériences, engendre la joie et l’amour. Les jeunes sont habituellement amateurs de musique, affirme l’A. Rien d’étonnant à ce que les Anciens, Platon et Aristote en tête, aient accordé la toute première place à la musique dans la formation des jeunes et cela pour un triple motif : l’éducation des passions, ses vertus thérapeutiques, et la forme, le sens, qu’elle donne au loisir. Aujourd’hui, on réaffirme avec vigueur l’importance de la musique dès l’éducation première. C’est le retour à un passé oublié. Anciens et modernes, affirme le philosophe, ont d’emblée accordé la première importance à l’éducation des enfants. Ils insistent tous sur le rôle de l’habitude et de l’exercice comme moyen d’éducation. Trois choses sont essentielles à l’éducation morale des jeunes : la nature, la raison et l’habitude. Sans l’apprentissage, la nature est aveugle. L’apprentissage sans la nature est imparfait. La pratique sans les deux ne donne rien. L’analogie retenue est celle de l’agriculteur : il faut un bon sol (la nature humaine), un bon cultivateur (l’éducateur) et la bonne semence (les conseils, l’exemple et l’instruction transmise par le verbe oral) pour construire un être humain équilibré. La nature la plus riche est gaspillée si on la néglige. C’est pourquoi l’art de l’éducation est indispensable. L’A. s’attarde ensuite à parler de la sagesse du corps. Le corps vivant n’est pas extérieur à l’être. Il est l’être. Il faut donc l’entraîner, l’éduquer. Toute intelligence pratique repose sur des aptitudes physiques. Malheureusement, la technologie favorise une paresse et un endormissement des facultés du corps qui ont des conséquences graves, puisque tout passe par l’attention, l’esprit alerte, l’oeil exercé et observateur, le développement des habiletés manuelles. Une saine philosophie de l’éducation attache de l’importance aux arts et aux lettres. C’est une nécessité. La beauté sauvera le monde. Et le réel s’articule autour de cette trinité : vérité, bonté, beauté. Le jeune doit voir, toucher les grandes oeuvres (peinture, sculpture) et prendre contact avec les grands textes de l’histoire. Le jeune veut qu’on l’élève. Et en l’élevant, on l’arrache à l’ignorance, aux préjugés, aux noirceurs qui encerclent le monde. Enseignant émérite lui-même, l’A. aborde, au chapitre 7, l’immense défi de l’enseignement. Le défi par excellence est de maintenir la connaissance vivante, l’empêcher de devenir inerte. Or, l’intelligence ne peut être menée que par le désir. Pour qu’il y ait désir, il faut qu’il y ait plaisir et joie. La joie d’apprendre est aussi indispensable aux études que la respiration aux coureurs. Enseigner, c’est donner, offrir. L’enseignant offre l’indication qui permet à l’élève de s’élever plus haut, de prendre des routes neuves, de saisir l’occasion d’emprunter des voies inédites. …