Recensions

Cardinal Georges-Marie Cottier, Vous serez comme des dieux. Paris, Éditions Parole et Silence (coll. « Sagesse et cultures »), 2008, 418 p.[Record]

  • Nestor Turcotte

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  • Nestor Turcotte
    Matane

Cet ouvrage retrace les principales péripéties de l’aventure de l’athéisme et de ses contradictions. L’Être divin incréé, pour la théologie chrétienne, a créé l’homme à son image. La conscience humaine, mesurant l’infinie distance entre l’image créée et son Principe, perçoit le désir d’une union parfaite avec lui. Elle commande l’attitude d’adoration et d’obéissance. Accueillant la voix du Tentateur, l’homme tente de se faire l’égal de Dieu et devient son rival. Il revendique pour lui une totale autonomie, indépendante et souveraine. Le besoin religieux d’adoration le fait alors osciller entre l’athéisme et l’idolâtrie. Il existe certes d’autres formes d’athéisme que celles qui ont retenu l’attention de l’auteur. Cependant, pour lui, les formes qui aujourd’hui présentent les plus grands défis ressortissent au matérialisme et au positivisme. Le « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob, non des philosophes et des savants » sert de point de départ de la réflexion du théologien. Qui sont les philosophes et les savants auxquels pense Pascal et qui sont les ennemis de la foi ? L’auteur en retient trois. L’adversaire principal est Descartes, représentant de l’esprit rationaliste. Ce dernier aurait bien voulu pouvoir se passer de Dieu ; mais il n’a pu s’empêcher de lui faire donner une chiquenaude, pour mettre le monde en mouvement ; après il n’a plus que faire de Dieu. Suit ensuite Spinoza pour qui la Révélation est sans objet, parce qu’à son degré suprême la connaissance philosophique atteint l’Absolu lui-même, et s’il en va de la sorte, c’est parce qu’ontologiquement la raison du philosophe s’identifie à cet Absolu. Le troisième et dernier penseur est Hegel. Pour le philosophe allemand, c’est la connaissance philosophique qui constitue la connaissance suprême. Elle porte indissociablement sur Dieu et sur le développement immanent de son autoposition, et dans son esprit, c’est Dieu lui-même qui accède par étapes dialectiquement articulées à la connaissance de soi. À partir de cette mouvance, la raison individuelle devient comme le magistère ultime et la liberté religieuse se présente comme une conséquence du libre arbitre. L’humanisme s’engage sur la voie du moralisme adogmatique, dont le déisme sera l’aboutissement. Les doctrines de la religion naturelle ne feront que prolonger cette problématique : à défaut de pouvoir convenir sur des vérités fondamentales contenues dans l’Écriture et dont l’interprétation serait évidente, on proposera un consensus portant sur les vérités naturelles touchant la divinité et la félicité humaine. Bientôt la religion naturelle se présentera comme une requête de la société civile elle-même et comme la base de la tolérance qu’elle exerce à l’égard des diverses religions. La religion chrétienne passe pour être une fable, juste bonne à séduire les « petits esprits ». La seule divinité acceptable est la Nature qu’il faut contenter en toutes choses. La saine philosophie écarte alors toutes les questions insolubles : péché, au-delà, enfer, ciel, immortalité de l’âme. La nouvelle philosophie affirme l’incapacité de la raison à saisir la réalité dans sa densité ontologique. Elle offre à la connaissance une explication purement subjectiviste ou sensualiste. Elle ne s’élève pas au-dessus de l’horizon du matérialisme. Le terrain est prêt pour accueillir l’athéisme sous ses formes modernes : le matérialisme et le positivisme. L’athéisme moderne est une aventure métaphysique, par laquelle l’esprit humain se pose comme véritablement causa sui. L’homme se pense comme totalement indépendant et libre, ne devant son être qu’à lui-même et rejetant toute dépendance à l’égard du Dieu de la Transcendance comme une aliénation et une offense intolérable à une autonomie farouchement revendiquée. Tout ce que l’homme est et tout ce qu’il a, il le tire de lui-même. Cette analyse conduit à la conclusion que la liberté humaine est …