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Introduction

De plus en plus d’entreprises pénètrent tôt et rapidement les marchés internationaux (Cavusgil et Knight, 2015). Ce phénomène est particulièrement observé chez les entreprises technologiques (Romanello et Chiarvesio, 2017). Cette situation s’explique par la nécessité de rentabiliser leurs frais de recherche et développement dans une fenêtre d’opportunité restreinte en raison de l’obsolescence rapide de la technologie et de la forte compétition (Murmann, Ozdemir et Sardana, 2015 ; Prashantham et Young, 2011). Jones, Coviello et Tang (2011) suggèrent d’étudier à la fois de jeunes entreprises internationales et d’autres plus âgées afin d’identifier les transformations potentielles à anticiper lors du processus de transition vers le stade de développement suivant.

Ainsi, une thématique émergente du champ de l’entrepreneuriat international se concentre sur les enjeux post- entrée (traduction du concept post-entry) de ces nouvelles entreprises internationales, soit cinq ans après le début de leurs ventes à l’étranger (Efrat et Shoham, 2012 ; Romanello et Chiarvesio, 2017 ; Sleuwaegen et Onkelinx, 2014). Or, le taux d’échec de ces nouvelles entreprises internationales, dans leur transition vers l’étape de post-entrée, est très élevé (Khan et Lew, 2018). Peu d’études empiriques à ce jour se sont attardées aux pratiques d’affaires à instaurer pour réussir ce passage (Gerschewski, Lew, Khan et Park, 2018 ; Prashantham et Floyd, 2019 ; Sadeghi, Rose et Chetty, 2018 ; Trudgen et Freeman, 2014).

L’objectif de cet article est justement de contribuer à la littérature émergente portant sur la comparaison des pratiques des nouvelles entreprises internationales technologiques lors des étapes d’entrée et de post-entrée dans les marchés internationaux (Gerschewski et al., 2018 ; Ibeh, Jones et Kuivalainen, 2018 ; Khan et Lew, 2018 ; Romanello et Chiarvesio, 2017 ; Sadeghi, Rose et Chetty, 2018). Considérant l’importance de la communication marketing pour le déploiement des ventes à l’international, cette étude vise à approfondir la compréhension de la façon dont ces entreprises utilisent les outils de communication marketing pour rejoindre leurs clients. Pour ce faire, en raison du faible nombre d’études comparant l’utilisation d’outils de communication marketing par les nouvelles entreprises internationales selon leur étape de développement, cette recherche exploratoire repose sur une méthodologie multicas pour analyser les pratiques de dix entreprises technologiques canadiennes : cinq à l’étape d’entrée et cinq en post-entrée.

L’intérêt de comprendre les changements dans les pratiques de communication marketing internationales réside dans la nécessité de réduire les taux d’échec des entreprises dans leur transition de l’étape d’entrée à l’étape de post-entrée afin de favoriser leur survie. Une communication marketing efficace pourrait mener au développement d’un avantage concurrentiel et à une meilleure performance, ce qui favoriserait une croissance à plus long terme (Coviello, 2015 ; Ibeh, Jones et Kuivalainen, 2018 ; Jones, Coviello et Tang, 2011).

Une telle perspective est d’autant plus appropriée dans le contexte où il ne s’agit pas des compétences premières des fondateurs des entreprises technologiques (Romanello et Chiarvesio, 2017). De plus, le secteur industriel se différencie de celui de la vente aux consommateurs (B2C), notamment en ce qui a trait à la quantité de clients (Gillin et Schwartzman, 2011) et aux moyens utilisés pour les motiver et les engager (Tickle, Adebanjo et Michaelides, 2011). Une analyse des pratiques de communication marketing et du rôle qu’elles jouent dans le développement des ventes B2B des nouvelles entreprises internationales technologiques aux étapes d’entrée et de post-entrée est donc nécessaire.

Les sections qui suivent présentent une revue de la littérature qui met en évidence l’importance à accorder, en entrepreneuriat international, à la mise en place de la communication marketing ; l’accent est mis sur les outils à privilégier selon les recherches dans le domaine. Par la suite, la méthodologie qualitative utilisée ainsi que le processus de collecte et d’analyse des données sont détaillés. Les résultats liés aux pratiques de communication marketing des entreprises étudiées sont présentés, comparés, puis discutés. L’article conclut avec des recommandations s’adressant aux gestionnaires et fournit des pistes de recherche futures.

1. Revue de la littérature

1.1. Nouvelles entreprises internationales

La présente recherche se situe dans le champ de l’entrepreneuriat international. Intégrant l’importance croissante de la reconnaissance des opportunités, Oviatt et McDougall (2005) définissent l’entrepreneuriat international comme la découverte, la validation, l’évaluation et l’exploitation d’opportunités au-delà des frontières nationales pour créer des biens et des services. La pertinence du cadre théorique d’Oviatt et McDougall (2005) se justifie par : sa reconnaissance dans la littérature (De Clercq, Sapienza, Yavuz et Zhou, 2012 ; Jones, Coviello et Tang, 2011), sa considération de l’impact du réseautage dans l’internationalisation des petites et moyennes entreprises (Coviello, 2006 ; Ellis, 2011 ; Harris et Wheeler, 2005 ; Mort et Weerawardena, 2006 ; Musteen, Francis et Datta, 2010) et sa validité dans un contexte d’entreprises technologiques (Al-Laham et Souitaris, 2008 ; Gassmann et Keupp, 2007 ; Nordman et Melen, 2008 ; Ojala, 2009 ; Tolstoy et Agndal, 2010).

Selon la définition initiale d’Oviatt et McDougall (1994), les nouvelles entreprises internationales visent dès leur naissance à générer des avantages concurrentiels par l’utilisation de ressources et la génération de revenus dans de multiples pays. Les recherches en entrepreneuriat international se sont d’abord concentrées sur les facteurs individuels, organisationnels et environnementaux qui influencent l’entrée précoce et rapide dans les marchés (Aspelund, Madsen et Moen, 2007). Les recherches sur les nouvelles entreprises internationales à l’étape de la post-entrée ont démontré l’importance des compétences fonctionnelles et dynamiques de l’entreprise, notamment en marketing (Coviello, 2015 ; Gerschewski et al., 2018), pour assurer la survie à long terme (Efrat et Shoham, 2012 ; Khalid et Larimo, 2012 ; Oxtorp, 2014 ; Trudgen et Freeman, 2014). Le marketing est l’activité, l’ensemble des institutions et les processus de création, de communication, de livraison et d’échange d’offres qui ont de la valeur pour les clients, les partenaires et la société dans son ensemble[2]. L’entreprise acquerrait ainsi sa légitimité et démontrerait une sophistication accrue de ses stratégies marketing (Turcan, 2011 ; Turcan et Juho, 2014 ; Zheng, Khavul et Crockett, 2012). Puisque le taux d’échec des entreprises à l’étape de l’entrée serait davantage lié à leur nouveauté qu’à la complexité associée à l’étendue de l’internationalisation (Sleuwaegen et Onkelinx, 2014), une compréhension du changement des pratiques et des outils utilisés entre l’entrée et la post-entrée est essentielle. Toutefois, ces changements demeurent peu compris (Ibeh, Jones et Kuivalainen, 2018). Une meilleure compréhension de ce passage pourrait favoriser la croissance des entreprises à plus long terme.

La communication marketing est reconnue comme étant une dimension importante du marketing qui comprend les actions, soit directes ou indirectes, de communication d’une entreprise avec ses clients et qui vise à favoriser la commercialisation de son produit ou service. Pour une jeune entreprise technologique, peu connue sur les marchés internationaux, qui vend un produit ou un service souvent inconnu ou peu connu, la communication marketing est essentielle.

1.2. L’apport des communications marketing aux spécificités des entreprises technologiques

L’habileté à gérer le marketing fait partie des capacités organisationnelles qui favorisent une internationalisation réussie des jeunes entreprises technologiques (Knight et Cavusgil, 2004). Il est aussi reconnu que les industries de haute technologie exigent une approche marketing particulière en raison des spécificités de leurs produits (Cahill et Warshawsky, 1993 ; Meldrum, 1995). Dans ces organisations, la direction marketing doit prendre en compte certaines particularités qui ont des implications pour les choix des pratiques et des outils de communication marketing. Ces caractéristiques sont classifiées dans deux catégories : interne et externe.

1.2.1. La communication marketing en réponse aux spécificités internes

Dans la catégorie interne, liée à l’environnement du travail hautement technique de l’organisation, se retrouve, d’une part, la séduction technologique, soit la tendance des scientifiques à se concentrer sur la performance de la technologie plutôt que sur le potentiel du marché. Le niveau de technicité des produits implique des répercussions plutôt positives sur la communication marketing dans le cas des marchés internationaux. En effet, au sein des industries technologiques, les entrepreneurs et les dirigeants possèdent une formation avancée en recherche qui mène au développement d’un vocabulaire commun et où l’anglais constitue la langue usuelle de travail à l’échelle internationale. Ceci facilite la communication entre vendeur et acheteur. Par exemple, des fiches, des notes techniques et des brochures sont essentielles pour permettre aux représentants de l’entreprise de communiquer les aspects techniques et les avantages compétitifs aux acheteurs.

Une autre spécificité interne, le cycle de vie technologique, implique que, lorsque la technologie atteint le stade où elle est plus facile à développer, l’entreprise doit établir des priorités pour le développement rapide des améliorations afin de pouvoir conquérir un marché plus grand, ou différents marchés. Diverses pratiques et outils de communication sont à la disposition des entreprises afin de faciliter la commercialisation et de trouver de nouvelles applications. Par exemple, les vitrines technologiques ainsi que les démonstrations du produit technologique lors des foires commerciales ou sur Internet permettent aux clients potentiels de voir la technologie « en action » et d’envisager des applications dans leur propre entreprise.

1.2.2. La communication marketing en réponse aux spécificités externes

Au niveau externe, liées aux caractéristiques principales des produits technologiques, quatre spécificités ont été identifiées : 1) la crédibilité du fournisseur et de la technologie ; 2) les standards liés aux produits et à l’organisation ; 3) le positionnement de la technologie ; et 4) l’infrastructure de la technologie et du marché. Trois de ces dimensions sont intimement liées à la communication marketing : la crédibilité, le positionnement et le support fourni par l’infrastructure du marché d’accueil. McKenna (1985) et Meldrum et Millman (1991) soulignent que la crédibilité devrait être placée au coeur des stratégies de marketing des entreprises de haute technologie puisqu’elle constitue une des clés de succès. D’ailleurs, la crédibilité est de deux types : la crédibilité rattachée à la technologie du produit de l’entreprise et la crédibilité de l’entreprise elle-même (Meldrum, 1995). La crédibilité liée à la technologie repose sur la confiance, de la part de l’acheteur, que la technologie livrera les bénéfices promis. En effet, la confiance dans la marque ou dans l’entreprise peut être vue comme étant une croyance et une attente ou une croyance et une volonté (McKnight, Kacmar et Choudhury, 2004). La communication marketing aura un impact positif sur la perception de la réputation de l’entreprise, même lorsque la marque est inconnue (Barone, Talor et Urbany, 2005).

La crédibilité rattachée à la technologie est importante dû au degré élevé d’incertitude de la part de l’acheteur et du fournisseur : ces produits ne sont pas encore acceptés comme étant des solutions naturelles aux problèmes pour lesquels ils ont été développés (Meldrum, 1995). Les actions suggérées dans le but de diminuer l’incertitude, de construire et de renforcer la confiance de l’acheteur sont toutes liées, directement ou indirectement, à la communication marketing. Par exemple, des démonstrations du produit permettent un contact personnel entre le client et des employés de l’entreprise, ouvrant la discussion à des applications potentielles pour le client. Les démonstrations fournissent aussi l’occasion de laisser du matériel promotionnel et des notes techniques entre les mains du client. Une entreprise technologique internationale à l’étape d’entrée peut ainsi bénéficier de ces pratiques et outils afin de bâtir la réputation de sa marque (Altshuler et Tarnovskaya, 2010).

Le deuxième type de crédibilité est celui rattaché à l’entreprise qui offre la technologie. Puisque beaucoup de produits de haute technologie sont développés par de petites entreprises (MacDonald, 1985 ; Meldrum, 1995), la crédibilité de l’entreprise technologique elle-même est parfois difficile à construire. En effet, celle-ci n’a pas de nom reconnu pour inspirer confiance à la clientèle potentielle, pour signifier qu’elle est un fournisseur crédible de ce type de produit. La crédibilité de l’entreprise technologique peut être améliorée par des démonstrations de haut profil, la reconnaissance de la part d’un chef de file de l’industrie, des relations favorables avec les médias, la nomination d’une personne reconnue à titre de vice-président, l’établissement d’une entreprise en copropriété avec un fournisseur bien établi. La majorité de ces actions implique une communication marketing appropriée.

Le positionnement du produit technologique peut réduire les difficultés liées à l’incertitude et au manque de reconnaissance des nouveaux produits technologiques. C’est la troisième dimension externe où la communication marketing est appelée à contribuer. Le positionnement du produit réfère à la perception des clients ciblés de toutes les dimensions de l’offre marketing vis-à-vis de l’offre compétitive (Ries et Trout, 1986). En plus du produit, de la distribution et du prix, c’est la communication marketing qui doit bâtir et promouvoir ce positionnement dans l’esprit de l’acheteur.

Finalement, l’infrastructure pour le marketing dans le marché cible doit pouvoir supporter la vente, la distribution et la communication reliées au produit de haute technologie. À ce niveau, la communication marketing est appelée, d’une part, à fournir des informations aux acheteurs, et, d’autre part, à informer et à éduquer les intervenants dans le marché (analystes financiers, consultants, associations commerciales) concernant la nouvelle technologie afin qu’ils puissent aider à promouvoir et à vendre le produit.

1.3. Autres pratiques de communication marketing

D’autres auteurs confirment que la proximité relationnelle de l’entreprise, la connaissance des clients ainsi qu’une relation de confiance avec ces derniers sont des facteurs primordiaux pour la croissance des ventes sur le marché international (Efrat et Shoham, 2013 ; Khavul, Perez-Nordtvedt et Wood, 2010 ; Lew, Sinkovics et Kuivalainen, 2013). Ces facteurs sont développés et enrichis par des communications marketing directes avec les clients, souvent sur une base individuelle (contact avec un représentant commercial ou un autre membre de l’équipe du vendeur, tel un ingénieur) ou dans un contexte plus large (contact lors d’une foire commerciale, une démonstration de la technologie à un groupe, une présentation scientifique lors d’un congrès).

Le service à la clientèle fournit aussi des occasions pour la communication marketing directe avec le client, souvent par téléphone ou par Internet. Il constitue une dimension essentielle pour le développement des ventes à l’international (Khavul, Perez-Nordtvedt et Wood, 2010). Cette communication est parfois suivie, dans un contexte B2B, d’une visite personnelle. Le service à la clientèle peut être défini comme étant un ensemble de processus, de pratiques et d’outils de communication axés sur les clients ; il soutient les opportunités de création de valeur dans la relation de l’entreprise avec ses clients. Loin d’être limitée au service après-vente, cette relation doit commencer lors de la conception des produits, se poursuivre à travers leur développement et continuer à évoluer après que le contrat de vente soit signé. Ce contact privilégié permet d’adapter les produits offerts aux besoins des clients, en tenant compte de leurs opinions et de leurs commentaires. Cela crée une proximité relationnelle avec les clients, de la satisfaction chez les clients et de la confiance dans des relations à long terme. Toutefois, le service à la clientèle nécessite un investissement en ressources humaines et financières.

1.4. Un modèle de communication efficace : le CMI

Une stratégie de communication efficace comprend un ensemble de pratiques et d’outils de communication dont l’usage vise à rejoindre les clients, actuels ou potentiels, par les moyens et dans des formes souhaitées par ceux-ci afin d’atteindre les objectifs poursuivis (Ellis, 2011 ; Gillin et Schwartzman, 2011 ; Veilleux, Haskell et Pons, 2011). Certains des moyens de communication sont plus traditionnels (documentation, force de vente, publication scientifique, foires commerciales, présentation à des congrès). Toutefois, les dialogues avec les clients, lors des foires commerciales ou des visites, par exemple, sont peu fréquents et très coûteux. D’autres moyens, plus récents, relèvent des technologies de l’information : courriel, site Web de l’entreprise, vidéoconférence, médias sociaux tels Facebook, YouTube, Twitter et blogues.

Cette multiplicité d’objectifs poursuivis, de pratiques et d’outils augmente sensiblement la complexité d’une stratégie de communication et mène au besoin d’une stratégie de communication marketing intégrée (CMI) (Kliatchko et Schultz, 2014). De plus en plus adopté mondialement par les entreprises, le modèle de communication CMI, à quatre niveaux de sophistication, est proposé comme un processus stratégique plutôt que tactique. Le niveau 1 se rattache à l’utilisation d’une variété de pratiques/outils de communication ; les messages y sont coordonnés pour garantir une synergie entre eux et fournir une seule voix à l’entreprise (one-sight, one-sound, one-feel communications) (Schultz et Schultz, 1998). Le niveau 2 prend en compte tous les points de contact possibles des clients et des autres membres du réseau avec l’entreprise et ses produits/services pour créer une expérience totale pouvant influencer les perceptions et la décision d’achat ou de collaboration. Le niveau 3 ajoute l’utilisation du numérique pour livrer des messages et du contenu personnalisés ; cette personnalisation est rendue possible par la collecte de données, le développement des bases de données et l’utilisation de pratiques/outils analytiques. Le niveau le plus sophistiqué, le niveau 4, comprend l’allocation de ressources, l’alignement organisationnel et un système d’évaluation qui permet de mesurer le retour sur l’investissement de ces actions. Un tel processus exige des ressources importantes, monétaires et humaines, de la part d’une entreprise. Toutefois, les nouvelles entreprises technologiques internationales (Altshuler et Tarnovskaya, 2010) sont obligées de trouver des manières novatrices qui mobilisent leurs compétences et leurs ressources modestes (Casadesus-Masanell et Zhu, 2013).

L’avènement et la progression dans la sophistication des technologies de l’information permettent à l’entreprise d’interagir régulièrement avec son environnement, particulièrement ses clients, à peu de frais. Dans un premier temps, Internet peut être utilisé pour avoir accès aux clients potentiels à l’échelle mondiale, rechercher des informations, interagir avec les acteurs de l’environnement, faire la promotion de l’entreprise, ou encore, optimiser les relations avec ses clients (Chong, Shafaghi, Woollaston et Lui, 2010). Cependant, Internet pris seul n’est pas encore l’outil idéal pour les transactions si l’offre est trop complexe et non standardisée, de même que dans certains cas où les contacts directs sont plus propices (nouveau client, négociation, préférences de l’acheteur, culture et coutumes du pays ciblé) (Moen, Madsen et Aspelund, 2008).

De plus, pour les jeunes entreprises impliquées dans des marchés internationaux, la communication marketing via les médias sociaux permet, à peu de frais et rapidement, de se faire remarquer, d’identifier des clients potentiels, de les solliciter et de gérer des relations d’affaires (Arenius, Sasi et Gabrielsson, 2006 ; Berry et Brock, 2004 ; Loane, 2006 ; Moen, Madsen et Aspelund, 2008 ; Prashantham, 2005 ; Reuber et Fischer, 2011 ; Rindova, Williamson, Petkova et Sever, 2006). Ainsi, les médias sociaux permettent d’offrir du contenu, de le commenter et de le partager en vue de se positionner et de gagner en crédibilité. D’ailleurs, les recherches portant sur l’utilisation des technologies de l’information mentionnent qu’elles sont de plus en plus utilisées par les entreprises et qu’elles contribuent à accélérer le processus d’internationalisation (Aspelund, Madsen et Moen, 2007 ; Coviello et Jones, 2004 ; Dimitratos et Jones, 2005 ; Keupp et Gassmann, 2009 ; Rialp, Rialp et Knight, 2005). Les entreprises technologiques post-entrées dépendent encore plus des moyens de communication du numérique (Morgan-Thomas et Jones, 2009).

La présente recherche se concentre sur les pratiques/outils de communication comprenant aussi bien des activités permettant la communication marketing (foire commerciale) que l’utilisation des pratiques/outils de communication soit traditionnels (brochure) ou numériques (site Internet). Un outil de communication est un support qui véhicule le message (le contenu) de l’émetteur au récepteur (une lettre, un courriel, un message verbal). Le moyen est le canal ou le média par lequel l’outil transite avec son message : une lettre est envoyée par la poste, un courriel est envoyé par Internet, un représentant livre un message verbal. Toutefois, la distinction n’est pas toujours claire. Par exemple, offrir le service à la clientèle peut être vu comme étant un outil ou une activité, une pratique, permettant la communication avec la clientèle. Aussi, la participation à une foire commerciale peut être vue comme étant un outil ou une activité, ou une pratique, de démonstrations, de présentations, de communication directe avec des clients actuels ou potentiels d’un secteur spécifique. L’objectif de cette étude exploratoire est de comparer les pratiques/outils de communication qui sont privilégiés par les entreprises en stade d’entrée et de post-entrée sur les marchés internationaux. Une meilleure compréhension de la communication marketing pour ce type d’entreprise vise à fournir des pistes pouvant accélérer leur développement international.

2. Méthodologie

La présente étude vise donc à comparer les pratiques/outils de communication marketing des nouvelles entreprises internationales technologiques à leurs étapes d’entrée et de post-entrée dans les marchés étrangers. Cette étude exploratoire touche le concept multidimensionnel du développement des entreprises, ce qui justifie le recours à une méthodologie qualitative afin de mieux saisir la complexité du phénomène (Morrison, Breen et Ali, 2003 ; Thévenard-Puthod et Picard, 2015 ; Wright et Stigliani, 2013). L’approche par cas est considérée comme appropriée pour répondre aux questions du « comment » et du « pourquoi » (Doz, 2011 ; Yin, 2003). Cette méthodologie est d’autant plus adéquate que les recherches précédentes en gestion internationale et en marketing international identifient le besoin de recherches qualitatives dans ce domaine pour détailler les pratiques/outils utilisés par les entreprises sur des thèmes nouveaux et en évolution (Andriopoulos et Slater, 2013 ; Birkinshaw, Brannen et Tung, 2011 ; Welch, Piekkari, Plakoyiannaki et Paavilainen-Mantymaki, 2011).

2.1. Contexte de la recherche

L’optique-photonique est une science qui se définit par la génération, le contrôle, la détection et le traitement de la lumière pour la transmission d’informations et de données (Frietsch et Grupp, 2006). Elle trouve des applications dans des secteurs aussi variés que les télécommunications, la santé et les sciences de la vie, la défense et la sécurité, l’environnement, l’industrie manufacturière et l’énergie et l’éclairage. Comme fréquemment observé en haute technologie, la plupart des entreprises du secteur sont des petites et moyennes entreprises ayant des revenus inférieurs à 10 millions de dollars (Photons-Canada, 2016). La région de Québec est considérée comme un lieu d’excellence, dynamique et d’avant-garde dans ce domaine en pleine expansion. Elle regroupe 35 entreprises et 5 centres de recherche majeurs. On y compte 3 000 emplois et le chiffre d’affaires de l’ensemble de ces entreprises s’élève à 400 millions de dollars, dont 85 % relèvent de l’exportation.

2.2. Étude de cas

Pour une analyse en profondeur des expériences des entreprises, Eisenhardt (1989) recommande l’étude de cas multiples, soit entre quatre et dix cas. Les cas doivent être choisis en fonction de leur degré de représentativité du phénomène étudié (Patton, 2002). L’objectif est ici de comparer les pratiques/outils de communication marketing des entreprises au début de leur internationalisation (en entrée) à celles des entreprises en post-entrée. Parmi les 35 entreprises opérant sur le territoire de la région de Québec, 10 entreprises furent analysées : 5 identifiées comme étant à l’étape d’entrée et 5 en post-entrée, avec une transition à l’âge de 5 ans (Efrat et Shoham, 2012 ; Romanello et Chiarvesio, 2017). Plusieurs critères d’échantillonnage ont été élaborés au préalable afin de sélectionner les entreprises pour l’étude : (i) entreprise démarrée par un entrepreneur ou un groupe d’entrepreneurs qui vise, dès le départ, des marchés internationaux ; (ii) opérer dans le domaine de l’optique-photonique et être localisée dans la région de Québec ; (iii) être autonome et non une succursale issue d’une entreprise mère ; (iv) fabriquer un produit fini à l’interne, et non pas en tant que sous-traitant ; (v) générer un chiffre d’affaires total inférieur à 25 millions de dollars canadiens. Conformément à la littérature sur les nouvelles entreprises internationales (Coviello et Jones, 2004 ; Jones, Coviello et Tang, 2011 ; Madsen, Rasmussen et Servais, 2000), les entreprises sélectionnées pour cette étude ont pénétré les marchés étrangers durant leurs six premières années d’existence et ont plus de 25 % de leurs ventes à l’international.

Tableau 1

Profil de l’échantillon

Profil de l’échantillon

a : E = entrée.

b : P = post-entrée.

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Le tableau 1 présente succinctement le profil des entreprises de l’échantillon. Ce tableau identifie l’âge de l’entreprise (c’est-à-dire le nombre d’années écoulées entre l’année de fondation et le moment où la présente étude a été initiée), le nombre d’employés, le chiffre d’affaires total, le pourcentage des ventes à l’étranger, le nombre de pays dans lesquels l’entreprise est impliquée et le nombre de continents où se trouvent ces pays. La classification de chacune des entreprises a été validée par l’organisme de développement économique régional spécialisé en optique-photonique.

2.3. Collecte des données

Pour approfondir la compréhension d’un phénomène complexe, plusieurs sources d’information ont été mobilisées (Dyer et Wilkins, 1991 ; Eisenhardt, 1989 ; Patton, 2002 ; Yin, 2003). Ces informations ont ensuite été triangulées pour maintenir l’intégrité de l’analyse (Miles et Huberman, 1994 ; Silverman, 2006). Ainsi, la collecte de données s’est déroulée en trois étapes : (1) une fiche de renseignements sur chaque entreprise a été complétée à partir des informations publiques ; (2) des entrevues semi-dirigées individuelles ont été conduites avec l’entrepreneur-dirigeant de l’entreprise ; et (3) des entrevues semi-dirigées ont été effectuées avec des experts dans le domaine.

Au départ, une fiche descriptive, puis un guide d’entrevue pour les dix entreprises composant l’échantillon furent développés. Le contenu de ces documents intègre différents concepts de recherche en entrepreneuriat et en marketing international liés aux pratiques/outils de communication. Les fiches descriptives contiennent des renseignements portant sur la création de l’entreprise, le nombre d’employés, le chiffre d’affaires et la présence internationale. Chaque fiche a été au préalable complétée par les chercheurs à partir d’informations publiques disponibles sur les sites Internet des entreprises, dans les médias (base de données Eureka) et dans les bases de données sur le Web (registre des entreprises du Québec et du Canada). Par la suite, chaque fiche a été validée par l’entrepreneur-propriétaire de l’entreprise en question. Le biais de mémoire des répondants a ainsi pu être contrôlé en comparant leurs affirmations à celles des documents officiels. Les informations recueillies ont été compilées dans un fichier Excel afin de dresser le profil de l’échantillon.

Dans un deuxième temps, les entretiens semi-dirigés individuels avec les entrepreneurs-propriétaires des dix entreprises, d’une durée d’environ deux heures chacun, se sont déroulés dans les locaux des entreprises. Les thèmes portaient sur les pratiques/outils utilisés par l’entreprise dans le but de se faire connaître et de vendre ses produits : lesquels étaient utilisés (pour la communication directe et indirecte, incluant les pratiques/outils traditionnels et numériques), dans quelles situations, dans quel but.

Dans un troisième temps, toujours en collaboration avec l’organisme de développement économique de la région spécialisé en optique-photonique, quatre experts oeuvrant dans le domaine de l’optique-photonique ont été identifiés. Chaque expert possède une expérience notable. Ces quatre experts sont reconnus dans le secteur comme étant des entrepreneurs « modèles ». Des entrevues individuelles, semi-dirigées, avec les quatre experts furent réalisées afin d’obtenir leurs commentaires eu égard aux pratiques/outils évoqués par les entrepreneurs lors des entretiens semi-dirigés individuels. Ces informateurs externes ont aidé à comprendre les dimensions multiples du contexte dans lequel les entreprises évoluent (Miles et Huberman, 1994). Enfin, la diversité des sources d’information a contribué à une vision plus complète du phénomène à l’étude.

2.4. Analyse des données

La méthode d’analyse des données proposée par Miles et Huberman (1994), soit la codification, l’organisation et la mise en relation des données fut utilisée. Une fois les entrevues retranscrites, elles ont été analysées afin de dégager les informations relatives aux thèmes généraux. Ces informations ont ensuite été codées à l’aide du logiciel QDA Miner selon une grille spécifique établie au préalable à partir de la littérature sur le sujet et des guides d’entrevue (Eisenhardt, 1989). Afin d’assurer une plus grande fiabilité, le codage des entrevues fut effectué de façon indépendante par deux personnes, puis comparé (Andriopoulos et Slater, 2013). Les résultats obtenus ne contenaient aucun écart significatif. Des tableaux de synthèse et des matrices ont ensuite été élaborés pour identifier les pratiques/outils de communication des entreprises par une analyse intracas, puis une analyse intercas (Miles et Huberman, 1994), d’abord entre les entreprises d’un même groupe (intragroupe) (entrée, post-entrée), et, par la suite, entre les deux groupes (intergroupes). Les quatre experts ont commenté les pratiques/outils des entreprises des deux groupes. Enfin, les résultats ont été confrontés à la théorie (Eisenhardt, 1989 ; Yin, 2003).

3. Résultats

3.1. Analyse globale

Les pratiques/outils de communication marketing mentionnés par les entrepreneurs-propriétaires ont été rassemblées dans le tableau 2. Aux fins d’analyse, ces pratiques/outils furent répartis en deux grandes catégories : 1) pratiques/outils reliés aux technologies de l’information (identifiées par les lettres « a » à « g ») et 2) pratiques/outils traditionnels (les lettres « h » à « y »). Cette deuxième catégorie est divisée en trois sous-catégories : événements (lettres « h » à « m »), documentation et publications (lettres « n » à « s »), relations personnelles (lettres « t » à « y »).

Ce tableau aide à répondre à la question de « comment » les PME technologiques communiquent avec leurs clients existants ainsi qu’avec des clients potentiels. La troisième colonne (totaux où n = 10) permet de calculer l’importance relative des fréquences d’utilisation de chacune des pratiques/outils par les deux groupes d’entreprises (entrée et post-entrée). D’autre part, en présentant les fréquences totales d’utilisation de chacune des pratiques/outils, cette colonne permet d’identifier les pratiques/outils les plus populaires dans chaque catégorie. Parmi les pratiques/outils numériques les plus utilisés par l’ensemble des entreprises se trouvent les médias sociaux (outil « a », 7 sur 10 entreprises les utilisent) et les démonstrations (outil « b » – 5 sur 10 – dont certaines par vidéoconférence). Dans la catégorie « événements », figurent : les foires commerciales (« h », 9 sur 10), les kiosques (i) lors d’un grand congrès mondial (4 sur 10) et les présentations (j) lors de conférences internationales (4 sur 10). Les entreprises communiquent aussi par la documentation et les publications (surtout les publications d’articles scientifiques (n) portant sur les applications (4 sur 10) et les fiches et notes techniques (o) par applications (disponibles sur le Web) (3 sur 10). Finalement, les entreprises s’appuient sur des relations personnelles. Les visites de courtoisie (t) permettent d’observer comment les industriels opèrent et de bâtir une relation (4 sur 10). Par la sollicitation de références personnelles (u), les entreprises demandent de recommander la technologie (4 sur 10) à d’autres organisations.

Tableau 2

Synthèse de l’utilisation des pratiques/outils de communication marketing

Synthèse de l’utilisation des pratiques/outils de communication marketing

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3.2. Communication marketing directe ou indirecte ?

Les figures 1 et 2 reprennent les pratiques/outils de communication du tableau 2, sans les catégories auxquelles ils ont été assignés, et les répartissent en deux nouvelles catégories : les pratiques/outils qui permettent aux entreprises de communiquer directement avec les clients actuels et potentiels (c’est-à-dire permettant une rétroaction ou une personnalisation du message) et les pratiques/outils reliés à une communication indirecte (un message à sens unique). Par exemple, une foire commerciale est un outil qui permet à un entrepreneur de rencontrer des clients potentiels (aussi bien que des fournisseurs, des distributeurs et d’autres personnes). Il peut répondre à leurs questions et adapter son discours à leurs besoins. La foire est donc considérée comme un outil permettant une communication directe. Une présentation lors d’un congrès scientifique ou un symposium, quoiqu’offerte à un groupe de personnes (un à plusieurs), permet à l’entrepreneur de répondre aux questions et de rencontrer, après la présentation, les personnes intéressées. Pour cette raison, ces présentations sont aussi considérées comme étant de la communication directe. L’utilisation de fiches techniques, imprimées pour distribution lors d’une foire commerciale ou affichées dans le site Web de l’entreprise, est un exemple de communication indirecte, même si ces fiches sont destinées à un groupe cible.

La figure 1 souligne clairement que les entreprises en post-entrée utilisent plus les pratiques/outils de communication directe par rapport aux entreprises en entrée. En fait, on compte plus du double du nombre d’utilisations : vingt-dix utilisations des pratiques/outils de cette nature par les cinq entreprises en post-entrée et seulement douze par les cinq entreprises en entrée. Quatre des vingt-six utilisations sont au niveau de conférences internationales et de symposium (communication de « un à plusieurs »). Vingt-deux (22), ou 84,6 %, des utilisations par ces entreprises permettent une communication de type personnel « un à un ». Aussi, le groupe en post-entrée utilise une plus grande variété de pratiques/outils (12) que le groupe en entrée (7). Quelques entreprises en entrée ont mentionné que certaines pratiques/outils de communication exigent des ressources humaines dont ils ne disposent pas.

Bien que le tableau 2 suggérait que les pratiques/outils de la catégorie « relations personnelles » distinguent les entreprises en post-entrée, de celles en entrée, avec 28 % des utilisations (11/39) par ce groupe, la figure 1 permet de souligner que la communication directe est encore plus importante pour ce groupe : 67 % (26 directes/[26 directes +13 indirectes]) ou les deux tiers des utilisations. Pour les entreprises en entrée, la catégorie « relations personnelles » du tableau 2 compte trois utilisations, soit 11 %. Toutefois, de la perspective de la figure 1, les communications directes s’élèvent à 43 % (12/[12+16]) des utilisations.

En contrepartie, les entreprises en entrée utilisent légèrement plus de pratiques/outils de nature indirecte : 16 indirectes (Figure 2) et 12 directes (Figure 1). À nouveau, il peut être observé que les entreprises en post-entrée privilégient les pratiques/outils directs (26 directes et 16 indirectes). Pour les pratiques/outils permettant une communication indirecte, le groupe en entrée utilise une plus grande variété de pratiques/outils pour rejoindre ses clients ainsi que ses partenaires actuels et potentiels (11 pratiques/outils utilisés et seulement 8 pour le groupe en post-entrée). Bref, les entreprises en post-entrée privilégient les pratiques/outils permettant une communication directe dans deux tiers des situations soit 67 % (26/[26+13]) alors que les entreprises en entrée utilisent davantage les pratiques/outils de communication indirecte (57 %, ou 16/[16+12]).

Figure 1

Pratiques/outils permettant une communication marketing directe

Pratiques/outils permettant une communication marketing directe

* E = entreprise en entrée ; P = entreprise en post-entrée.

Note 1 : E : 7 pratiques/outils différents ; P : 12 pratiques/outils différents.

Note 2 : le chiffre suivant les deux points indique le nombre d’entreprises qui utilisent l’outil (E : 1 P : 3 signifie que 1 entreprise en entrée et 3 entreprises en post-entrée ont indiqué faire usage de l’outil en question).

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Figure 2

Pratiques/outils permettant une communication marketing indirecte

Pratiques/outils permettant une communication marketing indirecte

* E = entreprise en entrée ; P = entreprise en post-entrée.

Note 1 : E : 11 pratiques/outils différents ; P : 8 pratiques/outils différents.

Note 2 : le chiffre suivant les deux points indique le nombre d’entreprises qui utilisent l’outil (E : 1 P : 3 signifie que 1 entreprise en entrée et 3 entreprises en post-entrée ont indiqué faire usage de l’outil en question).

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Le tableau 2 et les figures 1 et 2 indiquent comment les entreprises des deux groupes communiquent et à quel moment les différentes pratiques/outils sont davantage utilisés (en entrée ou en post-entrée). En complément, les commentaires des répondants (présentés dans les tableaux 3, 4 et 5) expliquent « pourquoi » les différentes pratiques/outils de communication sont utilisés. Pour présenter les perceptions des entrepreneurs-propriétaires reliées aux pratiques/outils de communication, il est approprié de revenir à une analyse portant sur les deux grandes catégories utilisées dans la synthèse des pratiques/outils de communication (Tableau 2) : pratiques/outils de communication traditionnels (Tableau 3) et pratiques/outils numériques (Tableaux 4 et 5). Dans ces tableaux, le répondant est identifié par son étape (E pour entrée ; P pour post-entrée) et le numéro de l’entreprise (1 à 5).

3.3. Les pratiques et les outils de communication traditionnels et numériques

En ce qui concerne les pratiques/outils de communication marketing traditionnels (Tableau 3), la sous-catégorie « événements » regroupe des pratiques/outils très populaires et les objectifs poursuivis par les deux groupes de répondants sont quelque peu différents. Ainsi, à titre d’exemple, les foires commerciales sont propices au développement des affaires puisque plusieurs personnes peuvent y être rencontrées (E3). Ces discussions peuvent mener à des visites ultérieures (P1) qui, elles, peuvent conduire à des ventes (E3). Les foires commerciales sont sélectionnées en fonction des produits à vendre (P1), du nombre de personnes présentes (P3) et de leur localisation géographique (P1). Les entreprises en entrée se servent des foires commerciales pour observer les clients et pour comprendre leurs besoins, pour se faire connaître par des clients (et à l’occasion par d’autres partenaires potentiels), pour gagner de la crédibilité en exposant leur technologie et pour générer des leads (pistes de vente). Pour les entreprises en post-entrée, les foires commerciales sont davantage utilisées pour entretenir leur relation avec leurs clients actuels. Certains répondants demandent directement aux autres participants aux foires de les aider à identifier les personnes influentes au sein des entreprises clientes potentielles.

Les présentations lors des conférences internationales procurent de la visibilité, mais aussi de la crédibilité en raison des informations portant sur la technologie qui peuvent alors être transmises à un grand nombre de spécialistes du domaine (E4, P2, P3, P5). Les travaux présentés peuvent avoir été effectués seulement à l’interne ou en partenariats (P2). Dans ce type d’industrie, la vente se fait surtout par des présentations techniques (E3). Des démonstrations sont alors nécessaires (E1, E3, P1, P2). L’étape d’internationalisation de l’entreprise (entrée, post-entrée) semble aussi aller de pair avec l’utilisation de présentations techniques lors des conférences internationales ; à cette occasion, l’entreprise peut présenter sa technologie à un grand nombre de spécialistes dans le domaine. Ici, les efforts plus limités des jeunes entreprises en entrée s’expliquent par le manque de ressources financières et humaines.

Plus les entreprises sont internationalisées, plus le nombre d’événements auxquels elles participent augmente (douze contre huit, soit 50 % de plus par les entreprises en post-entrée [Figure 1]). Elles privilégient les foires offrant à la fois des volets scientifiques et industriels, selon la présence des clients potentiels, des clients finaux (et d’autres membres de leurs réseaux). Elles choisissent les foires majeures, d’abord aux États-Unis, puis en Europe, et ensuite, pour entretenir les relations, dans les pays où elles viennent d’obtenir de gros contrats. Elles y font des démonstrations de leur prototype. Une entreprise en entrée a été invitée à présenter son produit technologique dans le kiosque d’un client potentiel, lors d’un grand congrès mondial. Avant d’acheter, le client potentiel désirait observer la réaction de ses propres clients à cette technologie.

L’expert 2 souligne la nécessité pour les entreprises d’être bien structurées dans leur approche aux événements ; par exemple, elles peuvent se procurer des listes de participants ou des listes de clients potentiels. Ces listes, disponibles sur Internet, peuvent leur permettre de faire des invitations ciblées, par courriel, à des rencontres et/ou des démonstrations lors de l’événement : « tu vas dans un tradeshow [une foire commerciale], tu peux acheter la liste des participants, donc tu as déjà une base de leads qui sont des gens intéressés par le marché où tu vas. Puis, tu envoies des courriels, tu vas à la pêche : venez nous voir à notre kiosque ». L’approche structurée doit continuer lors de l’événement avec la collecte des coordonnées des gens présents ; elles peuvent ainsi qualifier l’intérêt de ces gens et vendre sans démonstration supplémentaire, ce qui pourrait permettre d’éviter des coûts. Cet expert précise qu’il faut beaucoup de discipline et l’implication des gens seniors pour réussir à qualifier les clients potentiels : « Quand tu vas arriver pour faire ta démonstration, il faut que tu saches quel est l’objectif ; il faut qu’il y ait un critère de réussite à ta démonstration. Il faut que tu saches ce que le client veut voir. » L’entreprise s’assure ainsi de consacrer ses efforts à la bonne personne chez le client et d’éviter de dépenser inutilement. Toutefois, les nouveaux modes de communication pourraient avoir des répercussions sur ces conclusions.

Selon l’expérience des experts 1 et 3, les foires seraient moins utiles qu’auparavant, surtout lors de la post-entrée : « Via des shows [foires commerciales] ou sur le Web, on va avoir des demandes souvent plus de distributeurs que de clients à l’origine. » (E3)

D’autre part, pour rejoindre et intéresser un plus grand nombre de spécialistes, les entreprises en post-entrée sont plus actives au niveau de la publication d’articles scientifiques portant sur les applications (E4, P2, P3, P5), car leurs clients sont des scientifiques qui lisent ces revues (P2). Ces activités permettent d’augmenter la visibilité et la crédibilité internationales de l’entreprise et de sa technologie.

Les visites de courtoisie et la sollicitation de références personnelles sont utilisées davantage par les entreprises en post-entrée dans le but de développer les relations personnelles. Un répondant souligne l’importance de ne pas couper la relation avec les clients potentiels qui optent pour la technologie du compétiteur et qui n’achètent pas la technologie offerte. Ces « clients perdus » peuvent recommander la technologie de la PME à d’autres entreprises de leur secteur, ou de secteurs connexes, qui auraient avantage à choisir cette technologie puisque leurs besoins ne sont pas nécessairement les mêmes. De plus, une relation avec ces non-clients permettrait, dans certains cas, de recueillir des observations comparatives entre la technologie de l’entreprise vendeuse et celle du compétiteur qui a obtenu la vente.

Pour intéresser les nouveaux clients à leur technologie, peu importe leur provenance internationale, trois pratiques/outils présentent des solutions moins coûteuses : les références d’autres entreprises, des fiches techniques préparées par l’entreprise et des notes techniques rédigées en collaboration avec des clients. Les références représentent un puissant outil promotionnel pour les entreprises faisant partie de l’échantillon du fait que plusieurs marchés de niche sont de petits milieux dans lesquels les entreprises de l’industrie finissent par se connaître. La crédibilité de l’entreprise se bâtit alors par des références provenant d’autres entreprises, par les partenaires intégrateurs de systèmes et par les premiers clients. Les fiches techniques développées par l’entreprise montrent la performance de la technologie en fonction des types d’utilisation. Quant aux notes techniques, elles sont souvent rédigées en collaboration avec les clients pour expliquer leur expérience avec le produit.

Afin d’inspirer les acheteurs potentiels, certaines entreprises documentent diverses utilisations de leur produit par les clients et partagent l’information dans des brochures corporatives. Elles bâtissent un argumentaire de vente sur la réduction de coûts qu’apporte la technologie pour les clients. Quelquefois, elles présentent aussi la solution technologique concurrentielle alternative en termes de coûts et de délais. Une entreprise en post-entrée utilise la vitrine technologique. Dans ce cas, l’entreprise cliente permet l’installation de la technologie de l’entreprise vendeuse chez elle ; cette dernière accepte alors que la PME technologique puisse inviter des acheteurs potentiels pour observer la technologie en action. Un effet boule de neige est ainsi recherché.

En ce qui concerne les pratiques/outils numériques, les aspects positifs, tels que perçus par les répondants, sont présentés dans le tableau 4 « aspects positifs reliés à l’utilisation des pratiques/outils technologiques de communication ». En termes d’utilité, ces pratiques/outils sont vus favorablement, selon le répondant interrogé, pour la prise de contact, la visibilité, l’entretien de la relation et la commercialisation. Certaines entreprises intègrent les notes techniques à leur stratégie Web. Par exemple, trois entreprises fournissent des fiches techniques sur leur site. Afin de tirer le maximum d’information du site, les personnes doivent laisser leurs coordonnées et préciser leurs intérêts pour y avoir accès. Alors, chaque semaine, certaines entreprises analysent ces informations pour développer des leads (pistes de vente). Une des entreprises analyse mensuellement le trafic du site Internet pour savoir d’où proviennent les internautes et si leur origine est reliée à la demande pour ses produits. Dans certains cas, les perceptions positives apparaissant au tableau 4 doivent être nuancées par les commentaires de ces mêmes répondants dans le tableau 5 « opinions mitigées sur l’utilisation des pratiques/outils numériques ».

Trois répondants (P2-P3-P4) semblent convaincus des bienfaits reliés à l’utilisation d’une stratégie Web dans leur organisation respective ; il en est de même pour un répondant d’une entreprise en entrée (E2), quoique ce dernier n’utilise pas ces pratiques/outils pour l’instant, à part une page Web (Tableau 5). Néanmoins, les opinions sont partagées et certains répondants croient plutôt que ce type de stratégie n’est pas pertinent, voire nécessaire, pour le fonctionnement de leur entreprise (E5-P5). Entre ces perceptions contradictoires reliées à l’utilisation du Web se retrouvent des entreprises de l’échantillon qui semblent d’avis partagé (P1-E3-E4-E5). Par exemple, l’entreprise P1 a réalisé des ventes dans un nouveau pays grâce à un communiqué de presse affiché sur le site Web de l’entreprise. Par contre, quoiqu’il soit présent sur LinkedIn, le dirigent admet qu’il ne croit pas beaucoup aux sites Web dans son domaine et indique que les médias sociaux n’aident pas (Tableau 5).

Tableau 3

Pratiques/outils de communication marketing traditionnels

Pratiques/outils de communication marketing traditionnels

a Une entreprise en entrée a fait mention de visite de courtoisie et une autre, aussi en post-entrée, a parlé de sollicitation de références personnelles ; toutefois, ces entreprises n’ont pas offert de précisions reliées à ces pratiques/outils.

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Tableau 4

Aspects positifs reliés à l’utilisation des pratiques/outils numériques

Aspects positifs reliés à l’utilisation des pratiques/outils numériques

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Un examen plus approfondi des résultats reliés aux pratiques/outils numériques fait ressortir les raisons pour lesquelles certains répondants affichent des réticences quant à l’utilisation de pratiques/outils numériques au sein de leur entreprise, et ce, qu’elle soit en entrée ou en post-entrée (Tableau 5). Ces hésitations de leur part sont essentiellement liées 1) à leur perception que les pratiques/outils de TI (Facebook, LinkedIn, Twitter…) ne correspondent pas aux sources d’informations utilisées par la clientèle et 2) au manque de ressources humaines qui seraient requises pour répondre aux besoins. Ces explications aident à mieux saisir pourquoi les sites Web de certaines entreprises en entrée sont relativement simples (E2, E3). En fait, certains entrepreneurs semblent avoir une relation amour-haine avec les pratiques/outils des TI (P1, P5) et d’autres ne voient simplement pas le bénéfice de les utiliser (E3, E4, E5). Bref, ces stratégies ont l’inconvénient de ne pas toujours viser le public cible de ces entreprises, en plus de nécessiter du temps et de la main-d’oeuvre (qu’elles ne peuvent se permettre d’engager) pour l’entretien général des sites.

Tableau 5

Opinions mitigées sur l’utilisation des pratiques/outils numériques

Opinions mitigées sur l’utilisation des pratiques/outils numériques

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4. Discussion

Cette recherche, spécifique aux nouvelles entreprises technologiques internationales vivant des enjeux post- entrée dans les marchés étrangers, contribue à la littérature en entrepreneuriat international par l’analyse des pratiques et des outils de communication marketing qui visent à supporter le déploiement des ventes.

Il ressort de l’étude que les nouvelles entreprises technologiques internationales utilisent la communication marketing pour les aider à relever les deux défis majeurs auxquels elles font face : la nécessité d’une internationalisation très rapide afin de saisir les opportunités des marchés dynamiques et un contexte où les ressources humaines et financières sont limitées (Altshuler et Tarnovskaya, 2010 ; Zhou et Wu, 2014). Tel que le préconise Coviello (2015), les résultats démontrent que les entreprises en phase d’entrée peuvent s’inspirer des pratiques et des outils utilisés par des entreprises en post-entrée afin de bien identifier les changements potentiels à prévoir. Les résultats suggèrent que les nouvelles entreprises internationales à l’étape d’entrée, comparativement à celles en post-entrée, privilégient des pratiques de communication indirectes plutôt que directes. Les entreprises en entrée utilisent tout de même plusieurs pratiques de communication qui permettent de rencontrer directement des clients afin d’établir la crédibilité et la confiance ; cependant, elles le font deux fois moins que les entreprises en post-entrée et avec une variété moins grande de pratiques de communication. Des ressources restreintes, financières ou humaines, pourraient être des facteurs explicatifs. Or, des ajustements peu coûteux seraient possibles à l’intérieur d’une stratégie de communication marketing mieux planifiée.

Comme mentionné par Kliatchko et Schultz (2014), la communication marketing intégrée (CMI), utilisée de plus en plus globalement, est un processus stratégique qui implique la planification et la coordination des messages autour de la marque et de ses avantages compétitifs. Le niveau 1 comprend l’utilisation d’une variété de pratiques et d’outils de communications dont les messages sont coordonnés pour assurer l’harmonisation des objectifs et des messages diffusés sur le plan international. L’entreprise bénéficie de leur synergie ; ces combinaisons fournissent aux clients une idée claire de l’entreprise, des avantages compétitifs de ses produits et de son approche. Toutes les entreprises des deux groupes semblent être au niveau 1 du modèle CMI : elles utilisent une plus ou moins grande variété de pratiques et d’outils ; elles ne semblent toutefois pas s’adonner à des efforts de coordination explicites de celles-ci.

Le niveau 2 du modèle CMI se rattache à la prise en compte de tous les points de contact possibles des clients avec l’entreprise et ses produits/services. L’objectif est de créer une « expérience totale » pouvant influencer les perceptions et la décision d’achat. Certaines entreprises en post-entrée, qui utilisent un plus grand nombre de pratiques et d’outils, semblent espérer faire le plus de contacts possible avec les différents clients, et surtout avec les plus influents. Toutefois, « l’expérience totale » devrait être développée.

Le niveau 3 ajoute l’utilisation des technologies de l’information pour livrer des messages et des contenus personnalisés impliquant la collecte, l’analyse et l’utilisation de pratiques et d’outils analytiques. Au niveau le plus sophistiqué, le niveau 4, l’entreprise devrait allouer davantage de ressources à la communication, aligner l’organisation sur le modèle CMI et se doter d’un système d’évaluation qui permet de mesurer le retour sur investissement de ces différentes actions. Par contre, les entreprises de l’échantillon sont divisées quant à l’utilité du numérique, et rares sont celles qui tirent avantage de la synergie potentielle entre un site corporatif et les médias sociaux. En effet, toutes les entreprises des deux groupes possèdent un site Internet, plus ou moins développé ; toutefois, la presque totalité des entreprises s’en sert pour diffuser du contenu. Les sites Web des entreprises en entrée se résument souvent à une simple carte professionnelle ou au remplacement de bulletins d’information et de courriels par un affichage sur leur site.

Pourtant, les recherches portant sur les technologies de l’information mentionnent que ces dernières sont de plus en plus utilisées par les nouvelles entreprises internationales et qu’elles contribuent à accélérer le processus d’internationalisation (Aspelund, Madsen et Moen, 2007 ; Keupp et Gassmann, 2009). De fait, des médias sociaux permettent d’offrir du contenu et de le partager en vue de se positionner et de gagner en crédibilité et en visibilité. Ce marketing relationnel permet une communication directe, requiert de très courts délais et contribue à l’établissement de la confiance ; toutefois, ces pratiques/outils exigent du personnel pour faire le suivi et la mise à jour. Les spécialistes en marketing numérique (Gowel, 2012 ; Gunelius, 2011 ; Halligan et Dharmesh, 2010 ; Thomas, 2011) soulignent que la stratégie reliée aux médias sociaux doit supporter le site Internet de l’entreprise de même que les pratiques et les outils plus traditionnels de communication. Ainsi, dans un premier temps, le site Internet de l’entreprise permet de présenter un contenu et des activités dont la qualité et les références/témoignages qui s’y retrouvent servent à bâtir la crédibilité de l’entreprise.

Les médias sociaux tels YouTube, Facebook, Twitter, LinkedIn et les blogues de l’entreprise permettent d’obtenir de la visibilité et de diffuser, à plus grande échelle, le contenu en faisant des liens vers leur site Internet (Halligan et Dharmesh, 2010). Cette présence dynamique permet aux clients intéressés de repérer facilement le site Web et à l’entreprise technologique de se faire remarquer. Ces pratiques et ces outils favorisent une communication directe, requièrent de très courts délais et contribuent à l’établissement de la confiance. Moen, Madsen et Aspelund (2008) ainsi que Reuber et Fischer (2011) constatent que les médias sociaux permettent aux jeunes entreprises d’identifier des clients potentiels ainsi que de solliciter et de gérer des relations d’affaires à l’échelle mondiale. Toutefois, les entreprises du groupe en entrée démontrent davantage une utilisation passive (présence passive sur LinkedIn) et de l’incertitude quant à la pertinence des réseaux sociaux dans leurs domaines. La moitié des entrepreneurs interviewés (provenant des deux groupes, mais davantage de celui en entrée) affirme que, dans un contexte de marketing industriel, les clients ne sont pas sur les plateformes électroniques et qu’on n’y retrouve pas les décideurs. Certains sont uniquement inscrits sur LinkedIn, tout comme leurs employés, sans en voir l’utilité ni avoir le personnel pour entretenir ces plateformes. Un répondant mentionne que Facebook pourrait servir à faire discuter les gens sur un intérêt commun, à cultiver la communauté, à recruter des employés ou à tester les logiciels en format bêta ; toutefois, aucun des répondants n’indique en faire une telle utilisation. Une autre opportunité perçue par une entreprise est d’utiliser Twitter et Facebook pour annoncer leur présence à des expositions. Ces médias remplaceraient ainsi les lettres d’information et les courriels groupés ; ils seraient donc plus pertinents pour entretenir les contacts existants. Trois des entreprises sont favorables à la participation à des blogues ; des messages qu’elles ont publiés sur des sites spécialisés auraient permis de générer des leads (pistes de vente) et, par la suite, de réaliser des ventes. Les entreprises en post-entrée sont plus positives envers les médias sociaux. Leur utilisation de ces pratiques/outils interactifs est en progression.

Cette réticence de la part des répondants de la présente étude d’adopter les médias sociaux comme moyen de communication pourrait être expliquée, en partie, par des nuances apportées par la littérature. Le secteur industriel se différencie de celui de la vente aux consommateurs (B2C), notamment en ce qui a trait à la quantité de clients (Gillin et Schwartzman, 2011) et aux moyens utilisés pour motiver et engager les nouveaux clients d’affaires (Tickle, Adebanjo et Michaelides, 2011). Bien que les médias sociaux facilitent l’échange avec les partenaires de l’entreprise, leur utilisation pour la vente est relativement peu adaptée aux entreprises dont l’offre n’est pas standardisée (Moen, Madsen et Aspelund, 2008). L’achat d’un produit technologique implique un haut degré de risque pour l’entreprise cliente. Les contacts directs avec les partenaires étrangers sont jugés déterminants durant la phase initiale de la transaction où l’entrepreneur vise à identifier les besoins des clients, à calibrer la technologie pour fournir la solution appropriée à ces besoins et à construire les bases d’une bonne relation. Tout de même, Internet diminue les barrières d’entrée dans un pays, optimise le marketing global de l’entreprise (promotion du site) et facilite l’échange dans le cadre de relations déjà bien établies. Les pratiques et les outils numériques pourraient permettre aux entreprises en entrée de se faire remarquer rapidement, de gagner en crédibilité, d’identifier des partenaires potentiels et de se positionner dans un secteur porteur. Les entreprises gagneraient ainsi à combiner, de façon coordonnée et dans la mesure du possible, les pratiques et les outils numériques à leur stratégie de communication marketing traditionnelle, surtout à l’étape post-entrée.

Bref, en termes de pratiques de communication marketing pour le déploiement à long terme des ventes à l’étranger, Internet et les médias sociaux ne remplacent pas les relations humaines qui sont nécessaires au développement et à la performance des entreprises sur le plan international, mais ils fournissent un support important. Peu importe les pratiques et les outils utilisés, les entreprises des deux groupes, en particulier les entreprises en entrée, bénéficieraient d’une planification mieux structurée de leurs pratiques de communication en s’inspirant du modèle CMI pour en accroître la synergie. Elles pourraient ainsi aspirer à un plus haut taux de succès dans la transition vers la post-entrée.

Conclusions, limites et avenues de recherche future

Cette étude vise à mieux comprendre les pratiques de communication qui permettent aux entreprises technologiques de croître sur les marchés internationaux. Des études de cas multiples ont été effectuées auprès de dix PME du secteur de l’optique-photonique de la région de Québec. À la fois pour les entreprises en entrée et celles en post-entrée, les résultats indiquent que les dirigeants accordent une importance particulière à la communication avec leurs clients par une variété de pratiques et d’outils de communication.

Les résultats de cette recherche contribuent au développement du champ de l’entrepreneuriat international aussi bien qu’à celui du marketing international. De fait, ils aident à mieux comprendre les contraintes rattachées aux approches utilisées par les entreprises en entrée comparativement à celles en post-entrée, le tout dans un contexte industriel (B2B). La contribution majeure à la littérature se trouve dans l’analyse des pratiques et des outils de communication marketing utilisés. Bien que la présente recherche ait été réalisée auprès de PME en optique-photonique, d’autres PME technologiques oeuvrant dans un contexte industriel global pourraient en bénéficier. À travers la discussion des résultats et les points de vue des experts qui y sont intégrés, diverses recommandations sont offertes pour les entreprises en entrée et pour celles en post-entrée. Les commentaires visent à rendre plus efficaces leurs choix de pratiques et d’outils de communication marketing afin d’améliorer leurs efforts de communication.

Les limites de la présente recherche exploratoire ouvrent la voie à des pistes de recherches pour le futur. Elle a permis d’en apprendre sur les perceptions des dirigeants de PME technologiques eu égard à leurs pratiques et à l’utilisation des outils de communication marketing. Un élargissement de l’étude à un plus grand nombre de membres au sein des organisations, d’entreprises d’autres régions géographiques et d’autres secteurs technologiques approfondirait la compréhension du rôle réel de la communication et du marketing numérique dans un contexte industriel international.

D’autre part, cette étude compare les perceptions et les pratiques des entreprises à l’étape d’entrée à celles à l’étape de post-entrée. Il serait également possible de demander à des entreprises en post-entrée de comparer leurs pratiques actuelles à celles qu’elles avaient au stade d’entrée. Ultérieurement, une étude longitudinale aiderait à suivre la progression des PME visant le marché mondial de produits de haute technologie, dans leur intégration des pratiques et des outils, en s’inspirant de la perspective du CMI. Une telle approche permettrait de préciser les recommandations entourant les étapes à suivre dans cette démarche, tout en tenant compte des ressources humaines et financières disponibles au fil du développement de l’entreprise. L’âge et le profil des entrepreneurs et des dirigeants pourraient alors être considérés pour vérifier leur influence sur les stratégies Web déployées. Également, visant à suivre la progression des entreprises, une extension de ce travail pourrait comparer la pertinence des pratiques et des outils Web selon le niveau de développement du produit offert aux clients ; il pourrait s’agir d’un projet-pilote, d’un prototype, ou d’un produit personnalisé ou standardisé.

La présente collecte de données fut effectuée principalement lors d’entrevues semi-structurées, complétées par l’analyse de données secondaires. Dans le cadre de recherches subséquentes, une analyse comparative systématique des contenus des sites Internet des entreprises, des profils corporatifs LinkedIn et des autres médias sociaux permettrait d’approfondir les connaissances entourant l’utilisation de ces outils promotionnels chez des PME technologiques internationales, dans un contexte de marketing industriel. Des mesures d’efficacité pourraient être proposées et testées pour relier les pratiques de marketing numériques chez ces entreprises aux comportements de recherche d’information et d’achat des différentes catégories de clients. De plus, les clients eux-mêmes pourraient être interrogés sur leur perception et leur utilisation des outils Web dans leur processus d’achat. Il serait aussi intéressant d’étudier l’influence de la culture chez les vendeurs et les acheteurs, en formant un échantillon d’entreprises multipays. Enfin, à la lumière de toutes ces connaissances colligées, une étude confirmatoire menée sous forme d’enquête quantitative internationale complèterait bien l’ensemble de ces travaux.