Recensions

Leyla Sall, L’Acadie du Nouveau-Brunswick et « ces » immigrants francophones : entre incomplétude institutionnelle et accueil symbolique, Québec, Presses de l’Université Laval, 2021, 228 p.[Record]

  • Miary Raininoro

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  • Miary Raininoro
    Université de Moncton

L’ouvrage du sociologue Leyla Sall intitulé L’Acadie du Nouveau-Brunswick et « ces » immigrants francophones : entre incomplétude institutionnelle et accueil symbolique s’inscrit dans la lignée de travaux sur les discriminations raciales en situation d’immigration. Ses recherches révèlent les difficultés d’intégration souvent dissimulées que vivent les immigrants francophones au Nouveau-Brunswick. Dans ce livre, l’auteur propose une réflexion sur la capacité de l’Acadie du Nouveau-Brunswick à remplir ses fonctions de société d’accueil et sur la cohérence entre les discours des associations acadiennes qui promeuvent l’immigration francophone et le processus d’intégration socioprofessionnelle de « ces » immigrants. Un des points forts de cet ouvrage réside dans la richesse de la méthodologie adoptée par l’auteur : outre 78 interviews effectuées auprès de neuf types d’acteurs sociaux différents dans le domaine de l’immigration francophone en Acadie dont des immigrants, des employeurs et des militants acadiens, il s’appuie sur des observations et des conversations informelles lors des salons de l’emploi du Grand Moncton ainsi que sur deux groupes de discussion auxquels des militants acadiens et des immigrants ont participé. Le livre est constitué de sept parties précédées d’une introduction dans laquelle l’auteur contextualise la question de l’immigration francophone en Acadie. Ce besoin d’accueillir des immigrants francophones est directement lié aux défis démographiques, linguistiques et économiques de la province résultant du vieillissement de la population, de l’exode des jeunes vers les autres provinces canadiennes et du problème des transferts linguistiques. Dans la première partie, l’auteur distingue trois types de classement des communautés d’accueil, soit par leur situation macroéconomique, spatiale ou institutionnelle. Il utilise la troisième classification basée sur la complétude ou l’incomplétude institutionnelle en matière d’immigration de la communauté en question, ce qui renvoie à sa capacité sociétale et économique d’accueillir et d’intégrer des immigrants. Selon Sall, l’Acadie présente une incomplétude institutionnelle pluridimensionnelle. D’un point de vue spatial, son incomplétude s’explique par son caractère rural et son déficit d’attractivité aux yeux des immigrants. Cette incomplétude est également d’ordre linguistique puisque l’intégration économique des immigrants francophones est tributaire de leur maîtrise de l’anglais. Sur le plan politique, étant donné que l’Acadie n’a pas le pouvoir de décider des critères de sélection des immigrants et du nombre qu’elle peut accueillir, son rôle se limite à son militantisme et à la promotion de l’immigration francophone. Dans la deuxième partie de l’ouvrage, l’auteur discute du cadre juridique et des politiques publiques de l’immigration francophone en Acadie du Nouveau-Brunswick. Le gouvernement canadien s’est engagé à accueillir des immigrants francophones dans les communautés francophones minoritaires. Des activités de promotion comme Destination Acadie et Destination Canada sont organisées à cet effet. Plusieurs programmes d’immigration sont également mis en place pour faciliter l’obtention de la résidence permanente des demandeurs francophones (Entrée Express, projet pilote d’immigration au Canada atlantique, programme de mobilité francophone). Or, comme le fait ressortir Sall, l’objectif de la province quant au nombre d’immigrants francophones n’a pas été atteint en dépit des politiques publiques d’immigration francophone. Ces politiques publiques rencontrent cependant un succès symbolique auprès des communautés francophones par la reconnaissance du rôle de l’immigration, par les discours militants des élites et des institutions acadiennes et par la valorisation de la diversité sur le marché du travail. Dans la troisième partie, l’auteur présente trois groupes d’immigrants francophones différents : les étudiants internationaux, les immigrants franco-belges et les réfugiés congolais. D’abord, les étudiants internationaux sont considérés comme des immigrants potentiels en raison de leur jeunesse, de leur formation locale et de leur facilité d’intégration sur le marché du travail. Ensuite, le monde franco-belge se caractérise par l’immigration en famille, le rejet des grandes métropoles canadiennes et l’intérêt pour l’anglais. Le motif de …

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