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Ce livre sur la géographie de l’atelier à São Paulo s’inscrit dans un travail de recherche effectué par Sylvain Souchaud depuis l’année 2000 et qui s’est donc étalé sur plusieurs années. Par suite d’une enquête de terrain approfondie, Souchaud présente dans cet ouvrage la situation réelle des ateliers de confection qui se trouvent dans la ville brésilienne de Sao Paulo. Les immigrées formant les nouvelles populations de cette ville travaillent principalement dans le secteur de la confection, qui s’est imposé au fil du temps dans la métropole. De fait, l’auteur montre que l’atelier de confection fait partie de l’imaginaire urbain de la ville industrielle et qu’il existe un lien étroit entre les deux. C’est ce lien particulier entre l’atelier et l’urbain qui constitue l’essentiel du contenu de ce livre. Souchaud propose en fait une analyse croisée de l’industrialisation et de l’urbanisation à partir de l’objet social que représente l’atelier, et qu’il appelle le « projet métropolitain ».

L’ouvrage est découpé en six chapitres et s’étale sur 370 pages. Une introduction générale traite des mutations et de l’évolution de l’atelier, ainsi que de son lien avec la ville de São Paulo. Par la suite, en introduction toujours, l’auteur brosse un tableau des spécificités de cette métropole et, enfin, il présente l’enquête de terrain et les données statistiques de son étude. Le premier chapitre fait état de la croissance urbaine de Sao Paulo, et de son décollage démographique et industriel, avant de raconter l’arrivée du vêtement bon marché, avec la diversification de la confection de Rio de Janeiro vers São Paulo. L’auteur retrace aussi la trajectoire de l’industrie de la confection dans l’économie brésilienne des années 2000, tout en précisant que la main-d’oeuvre y est majoritairement féminine et migrante. Le deuxième chapitre porte sur l’industrialisation et l’immigration, particulièrement dans le Bràs et le Bom Retiro où les ouvriers étrangers quittent les plantations afin de rejoindre la métropole pour travailler dans les ateliers de confection. L’auteur note le déclin et le repeuplement du centre malgré le maintien de la confection, des années 1950 aux années 2000. Dans le chapitre suivant, on observe la situation de l’immigration internationale au Brésil, notamment l’arrivée des Paraguayens et des Boliviens en quête de travail dans les ateliers de confection de la métropole. Puis, le chapitre IV met en exergue la définition des ateliers de confection, le travail à domicile, la sous-traitance, son encadrement et la main-d’oeuvre concernée. L’auteur établit une typologie des ateliers, ainsi que de leur organisation. Il note que le fait de travailler et de se loger dans un même espace pose un problème, que la distinction entre l’espace de travail et le lieu de vie reste primordiale, et il explique comment s’effectue l’insertion dans le bâti du tissu urbain. Le cinquième chapitre rapporte que les ouvriers ont des carrières brèves dans la confection, et que la majorité d’entre eux développent un sentiment de frustration à cet égard. Peu d’entre eux réussissent dans ce domaine. Ce chapitre décrit aussi la vocation entrepreneuriale des migrants internationaux, dont beaucoup travaillent en entreprise familiale, notamment dans les sweatshops, ces établissements de misère que constituent souvent les ateliers de couture. Le dernier chapitre montre le recul de l’industrie et le développement des services dans la ville. Une réorganisation et une reterritorialisation du secteur de la confection s’avèrent donc nécessaires. Pour cela, l’option du centre-ville avec sa forte densité urbaine est un choix obligatoire, bien que ce secteur se soit développé par la suite en banlieue avec des projets entrepreneuriaux familiaux.

Le fait de considérer l’atelier de confection comme un objet d’étude, un objet géographique, a permis d’explorer efficacement la relation qui existe entre l’immigration et la métropole, ainsi que les différentes formes d’évolution de la société urbaine. Le fil conducteur de ce livre, représenté par l’atelier de confection, son organisation productive et ses relations sociales, offre une vision sur l’univers dans lequel se trouve la confection, nourrie par la dynamique des migrations et traçant dès lors une trajectoire urbaine, démographique et économique au sein de la société brésilienne du XXe siècle.