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Centré sur la relation enfant-espace urbain, cet ouvrage traite des processus de la perception environnementale de l’enfant, avec une attention particulière portée à certaines variables (sexe, âge, particularités sociales et culturelles). Dans le sillage de Lynch[1]et de Ledrut[2], l’auteur annonce d’emblée le projet de renouveler les approches de l’environnement bâti. Deux objectifs sont affichés : analyser la construction des représentations des formes spatiales chez l’enfant et formuler des recommandations dans le domaine de l’amé-nagement de l’espace urbain, pour « la réinsertion de l’enfant dans la ville » (p. 160). Se situant d’un point de vue théorique au croisement d’une démarche propre à l’interactionisme social et d’une approche socio-sémiotique, l’auteur a travaillé dans la ville de Thessalonique sur un échantillon de 77 enfants âgés de 11 à 12 ans, une tranche d’âge correspondant au dernier stade de développement spatio-mental. Des cartes cognitives accompagnées de questionnaires axés sur la connaissance de la ville dans ces différentes unités de références (centre-périphérie) et sur les pratiques socio-spatiales abordées à partir des activités de l’enfant composent le corpus méthodologique.

L’originalité de ce travail réside dans l’idée d’articuler les représentations aux notions d’action et d’acteur. Pour ce faire, l’auteur distingue deux types d’activités : « les activités stratégiques », où l’enfant explore seul l’espace, et celles qu’il pratique en compagnie d’adultes et où il serait, selon l’auteur, plus passif dans sa relation à l’espace. Les résultats des analyses font, entre autres, apparaître le fort symbolisme de la centralité dans l’image de la ville chez l’enfant et ce, quel que soit son lieu de résidence (périphérie ou centre). Il en ressort que les connaissances des enfants portent en tout premier lieu sur leur quartier de résidence. Les cartes les plus élaborées sont l’oeuvre de ceux qui habitent le centre et pratiquent l’espace seul. Sont par ailleurs distinguées deux types d’images. Les premières, dites objectives, sont celles qui rendent compte de l’espace de référence, dans sa globalité. Les secondes, qualifiées de subjectives, s’identifient « à l’espace personnel de l’enfant ou encore à un espace imaginaire » (p. 156). Par ailleurs, l’auteur développe une notion de degré de subjectivité dans l’analyse de la production graphique.

On aurait souhaité sur ces derniers points davantage d’éclaircissements. Doit-on qualifier une carte mentale d’objective parce qu’elle restitue plus ou moins fidèlement l’espace de référence? La carte cognitive, comme le souligne M.-L. Félonneau, « ne donne aucune idée objective de l’espace […]. Elle n’est pas non plus le décalque plus ou moins maladroit du réel spatial, elle en est une reconstruction »[3]. Si l’on peut par ailleurs regretter les faiblesses de conception du plan général du livre où la troisième partie annoncée, composée d’un seul chapitre, est tour à tour corps du développement et conclusion, on appréciera tout de même la densité et la diversité des références utilisées dans une perspective interdisciplinaire, qui restituent ainsi au sujet toute sa complexité.