PrésentationEntre les vertus du contrat et les illusions perdues[Record]

  • Louise Langevin

Je me suis inspirée du plan du texte de Maryline Bruggeman, « Conventions de rupture et parenté », (2008) 49 C. de D. 589

Manifestation de la reconnaissance de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les constitutions et les documents de protection des droits fondamentaux, les réformes en droit de la famille sont imprégnées du respect du droit à l’égalité entre les sexes. Dès lors, l’application de ce droit fondamental peut expliquer en partie l’apparition du contrat comme outil de règlement des conflits conjugaux. Le contrat étant présenté par les tribunaux et la doctrine comme un outil de négociation préférable à une solution imposée par les autorités, l’idée de la contractualisation en droit de la famille est séduisante certes. On reconnaît ainsi l’égalité des conjoints et leur liberté contractuelle. Le mari n’est plus le chef de la famille. Le couple n’est plus considéré comme la seule entité. C’est aussi une conséquence des progrès accomplis par les femmes. Elles sont en mesure de décider pour elles-mêmes. L’idée du contrat suppose également qu’il y a eu négociation entre les parties et que la solution agrée à celles-ci. Il se dégage une idée d’harmonie. La contractualisation en droit de la famille reconnaît une nouvelle conception du contrat comme instrument de coopération, de confiance et non comme instrument de coercition. Cependant, le contexte familial est différent de la réalité commerciale, où deux parties négocient, contractent et exécutent ou non le contrat, et poursuivent leur route séparément. Ainsi, les ententes à la suite d’un divorce ne mettent pas fin à la relation. La présence d’enfants et le versement de pensions alimentaires maintiennent une certaine relation entre les parties. En outre, des circonstances imprévisibles peuvent demander la réouverture des ententes entre les ex-conjoints. Le présent numéro des Cahiers de droit vise à analyser d’un point de vue juridique la tendance à la contractualisation au moment de la rupture conjugale, et ce, en France et au Québec. Le contrat est-il un outil adapté au contexte de rupture conjugale ? S’il ne l’est pas, comment l’adapter ? Quels en sont les avantages et les inconvénients ? Toutefois, est-ce vraiment un contrat au sens juridique du terme ? Comme le démontrent les textes réunis ici, des deux côtés de l’Atlantique, le consensualisme dans la sphère privée doit être très bien encadré pour protéger les intérêts des parties visées. La solidarité conjugale ne mène pas toujours à des aménagements équitables pour les parties. Les textes rassemblés dans ce numéro sont le fruit d’une journée de réflexion tenue en avril 2007 sur le sujet de la contractualisation de la rupture conjugale à la Faculté de droit de l’Université Laval. Cette rencontre a été possible grâce à la participation financière du Centre de droit privé de l’Université des sciences sociales de Toulouse, dirigé par la professeure Claire Neirinck, du programme d’échange entre la Faculté de sciences juridiques de cette université et la Faculté de droit de l’Université Laval et de la Chaire d’étude Claire-Bonenfant sur la condition des femmes de l’Université Laval. Que toutes les personnes qui ont pris part à cette journée soient remerciées pour leur grande disponibilité et la qualité des échanges. Les auteures et les auteurs québécois abordent dans les pages qui suivent la limitation de la liberté contractuelle que constituent, pour certaines personnes, les règles sur le partage du patrimoine familial et l’ouverture sur la liberté contractuelle que représente, pour d’autres, la médiation familiale. Quelle ambivalence dans le Code civil du Québec ! Comme le précise Christine Morin dans son texte intitulé « La contractualisation du mariage : réflexions sur les fonctions du Code civil du Québec dans la famille » : En proposant la médiation aux couples qui se séparent, le législateur québécois a choisi la voie de la …

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