Chronique bibliographique

Trudo Lemmens, Mireille Lacroix et Roxanne Mykitiuk, Reading the Future ? : Legal and Ethical Challenges of Predictive Genetic Testing, Montréal, Thémis, 2007, 308 p., ISBN 978-2-89400-229-2.[Record]

  • Silvia Visciano

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  • Silvia Visciano
    Université de Foggia (Italie)
    Université Paris I Panthéon-Sorbonne

Au cours des dernières décennies, l’attention médicale traditionnellement centrée sur la maladie s’est déplacée progressivement vers l’illness risk. L’étude de la génétique humaine subit en conséquence un changement d’ordre épistémologique, ainsi que médical et sanitaire. Toutefois, si la collecte, le dépistage, le traitement, le stockage et l’utilisation des données génétiques humaines constituent des opérations désormais essentielles pour le progrès scientifique, l’usage pourrait-il porter atteinte à la dignité de l’être humain dans la mesure de son identification ou encore de sa discrimination potentielle ou réelle ? L’ouvrage publié par Trudo Lemmens (professeur associé aux facultés de droit et de médecine de l’Université de Toronto), Mireille Lacroix (analyste principale de politique auprès de l’Agence de santé publique du Canada) et Roxanne Mykitiuk (professeure associée à l’Osgoode Hall Law School), ouvrage auquel ont contribué Lisa Austin (professeure assistante à la Faculté de droit de l’Université de Toronto) et Bita Amani (professeure assistante à la Faculté de droit de l’Université Queen’s), se penche sur cette question tant juridique qu’éthique. Cette publication constitue, en effet, le résultat pertinent des recherches et des délibérations menées depuis 2001 par le Comité consultatif de l’Ontario sur les nouvelles technologies génétiques prévisionnelles (secteur relatif aux problèmes d’ordre éthique et juridique) et dernièrement mises à jour pour l’édition. L’ouvrage commence par une question de compréhension générale : « Why does genetic information merit special attention ? » (p. 1) qui est d’abord circonscrite à un regard juridique canadien, puis élargie à une analyse comparative (p. 8). L’interrogation est complexe et reçoit plusieurs réponses spécifiques. Ces dernières représentent le résultat clair et concret, pourtant partiellement exhaustif, d’un itinéraire thématique que nous résumons en huit sections ci-dessous : Les tests par analyse comparative d’ADN peuvent aider la prévention médicale, mais à court ou à long terme, ils peuvent aussi porter atteinte à l’intimité génétique des individus en ce qui concerne les enjeux décisionnels au sujet des politiques assurancielles et de l’emploi. À propos de ce dernier point, les auteurs précisent : « much of the literature about genetic discrimination […] comes from the United States of America, where the issues of employment and insurance discrimination are intrinsically linked […] there are areas in which predictive genetic testing can be used with discriminatory results, such as financial services, education, adoption and access to health care » (p. 9). Bien que la Charte canadienne des droits et libertés (1982) et le Code des droits de la personne de l’Ontario (1990) interdisent toute forme de discrimination, « [t]his does not mean that all forms of differential treatment based on these enumerated traits are prohibited » (p. 11). Les perspectives législatives internationales n’échappent pas non plus à ces limites et le principe de bona fides se révèle souvent insuffisant. Les risques de stigmatisation existent donc sur un plan plus élevé, celui du traitement inégal des hommes, des femmes et des enfants, et ils pourraient prendre dans l’avenir une forme ethnique, raciale, sexuelle ou sanitaire. Les craintes théoriques s’ancrent déjà dans une certaine réalité (cf. la jurisprudence mentionnée par les auteurs aux pages 39 et 41) et les instruments dont le droit existant se munit ne paraissent plus suffisants pour une sauvegarde satisfaisante de la personne à tous les niveaux et dans tous les contextes de sa vie relationnelle. Les nouvelles frontières et structures des droits (de la personne, civiques, sociaux) que les auteurs envisagent (p. 43-45 et 64-65) doivent être orientées vers la protection des sujets contre les risques dictés par un « racisme » plus subtil et plus pernicieux qu’auparavant, fondé sur la collecte et l’analyse projective des caractéristiques personnelles pour des …

Appendices