EN:

In this article, two historians of medieval and early modern Italy explore the impact of seasonal rhythms and routines on the social structures and practices of rural communities in central and northern Italy between the fourteenth and seventeenth centuries. We also investigate how rural inhabitants and those with authority over them responded to the challenges and opportunities posed by seasonal change. Primary sources include episcopal visitations, the diary of a rural priest, statutes from rural communities, testimony before episcopal courts, chronicles, and the records of magistracies in mountain communities. Studying the relationship between seasonality, sociability, and power relations in rural communities challenges one-dimensional narratives of premodern “peasant” life and instead demonstrates the complex and fluid nature of rural society.

FR:

Dans cet article, deux historiennes de l’Italie médiévale et renaissante explorent l’impact des rythmes saisonniers et des occupations qui les caractérisent sur les structures et les pratiques sociales des communautés rurales du centre et du nord de l’Italie entre le XIVe et le XVIIe siècles. Nous nous intéressons également à la façon dont les habitants des campagnes et les personnes ayant autorité sur eux ont réagi aux défis et aux nouvelles possibilités apportés par les changements saisonniers. Nos sources primaires comprennent des visites épiscopales, le journal d’un prêtre de campagne, des lois alors en vigueur dans des communautés rurales, des témoignages effectués devant des tribunaux épiscopaux, des chroniques, ainsi que des registres de magistrats oeuvrant dans des communautés vivant dans les montagnes. L’étude de la relation entre saisonnalité, sociabilité et relations de pouvoir dans les communautés rurales remet en question les récits unidimensionnels de la vie « paysanne » prémoderne et révèle, au contraire, la nature complexe et fluide de la société rurale.

EN:

Using printed and archival records, this article analyzes the sensory practices associated with air quality in sixteenth- and seventeenth-century Italy. Air pollution was a prime concern for early modern Italians, particularly in urban centres where industry, density, and frenetic sensescapes were thought to prompt chronically unhealthy airs. According to early modern experts, air quality was at the root of individual and public health. My analysis shows how Italians relied on a robust set of sonic and olfactory tools to cleanse the air and craft healthy environments. Simultaneously, a contrasting set of sounds and smells were thought to pollute the air. The sensory practices surrounding air quality reveal the highly localized and personalized nature of early modern environmental practice. This article argues that entwined social and environmental conceptions of purity and pollution shaped sensory, social, and environmental experience in the premodern city.

FR:

À l’aide de documents imprimés et d’archives, cet article analyse les pratiques sensorielles associées à la qualité de l’air dans l’Italie des XVIe et XVIIe siècles. La pollution de l’air était une préoccupation majeure pour les Italiens de la première modernité, en particulier dans les centres urbains où les activités industrielles, la densité de population et la stimulation constante des sens étaient perçues comme des facteurs contribuant à une insalubrité chronique de l’air. Selon les doctes de cette période, la qualité de l’air constituait le fondement de la santé individuelle et publique. Mon analyse montre comment les Italiens avaient recours à un toute une gamme de ressources sonores et olfactives pour purifier l’air et créer des environnements sains. Dans la même logique, on pensait qu’un ensemble différent de sons et d’odeurs contribuait à dégrader la qualité de l’air. Les pratiques sensorielles relatives à la qualité de l’air révèlent la nature hautement localisée et personnalisée des pratiques environnementales de la première modernité. Cet article soutient que des conceptions sociales et environnementales combinées de la pureté et de la pollution ont façonné l’expérience sensorielle, sociale et environnementale dans la ville prémoderne.

EN:

This article examines olfactory offenses in early modern London. It explores how inhabitants managed causes of malodorous air, focusing on common nuisances stemming from everyday household practices like laundry and waste management. Clotheslines were hung up between lodgings, households disposed of kitchen waste in gutters overflowing with garbage, and neighbours used stinking, communal privies. Seasonal weather intensified the city’s poor air quality, and rainwater washed refuse into urban rivers. In the early seventeenth century, the growing awareness of the effects of air quality on health coincided with significant demographic changes in the city. Insalubrious air was intrinsically linked to increased migration, overcrowded neighbourhoods, and the spread of diseases. The improvement of the city’s air quality became a more immediate concern for Londoners, civic authorities, and the early Stuart monarchs, who deployed a range of sanitation strategies. As London grew, so too did concern for its inhabitants and the dwellings they occupied.

FR:

Cet article examine les délits olfactifs dans la ville de Londres de la première modernité. Il explore la gestion que faisaient les habitants des pratiques engendrant de mauvaises odeurs, en se concentrant sur les désagréments courants découlant de pratiques domestiques quotidiennes comme la lessive et la gestion des déchets. Des cordes à linge étaient suspendues entre les logements, les ménages jetaient leurs déchets de cuisine dans des caniveaux débordant d’ordures, et des toilettes communes puantes servaient tout un voisinage. Le climat saisonnier intensifiait la mauvaise qualité de l’air de la ville et l’eau de pluie charriait les déchets dans les rivières urbaines. Au début du XVIIe siècle, une prise de conscience de l’incidence de la qualité de l’air sur les conditions de santé coïncida avec d’importants changements démographiques dans la ville. L’insalubrité de l’air était intrinsèquement liée à une augmentation des flux migratoires, à la présence de quartiers surpeuplés et à la propagation des maladies. L’amélioration de la qualité de l’air de la ville devint une préoccupation plus pressante pour les Londoniens, les autorités civiques et les premiers monarques de la dynastie des Stuart, qui déployèrent une série de stratégies d’assainissement pour remédier à la situation. La croissance de Londres à cette période s’accompagna d’un intérêt accru pour le bien-être de ses habitants et pour les logements qu’ils occupaient.

EN:

Michel Foucault argued famously that early modern European governors responded to plague by quarantining entire urban populations and placing citizens under minute surveillance. For Foucault, such sixteenth- and seventeenth-century policies were the first steps towards an authoritarian paradigm that would only emerge in full in the eighteenth century. The present article argues that Foucault’s model is too abstracted to function as a tool for the historical examination of specific emergencies, and it proposes an alternative analytical framework. Addressing itself to actual events in early modern Italy, the article reveals that when plague threatened, Florentine and Bolognese health officials projected themselves into a spatio-temporal dimension in which official actions and perceptions were determined solely by the spread of contagion. This dimension, “plague time,” was not a stage on the irresistible journey towards Foucault’s “utopia of the perfectly governed city.” A contingent response to a recurrent existential menace, plague time rose and fell in response to events, and may be understood as a season.

FR:

Dans un ouvrage célèbre, Michel Foucault a soutenu que les mesures que déployait la classe dirigeante de la première modernité en réponse à la peste consistaient à placer les citoyens sous une étroite surveillance et à contraindre de larges pans de la population urbaine à se soumettre à une quarantaine. Pour Foucault, ces politiques des XVIe et XVIIe siècles représentaient les premiers pas vers un paradigme autoritaire qui n’émergerait pleinement qu’au XVIIIe siècle. Le présent article soutient que le modèle de Foucault est trop abstrait pour servir d’outil à l’examen historique de situations d’urgence spécifiques et propose un cadre d’analyse alternatif pour aborder ces problématiques. S’intéressant à des événements réels survenus dans l’Italie de la première modernité, cet article révèle que, lorsqu’ils se trouvaient sous la menace de la peste, les responsables de la santé florentins et bolognais se projetaient dans une dimension spatio-temporelle différente, dans laquelle seule la propagation de la contagion dictait les actions et les perceptions officielles. Cette dimension, le « temps de la peste », ne représentait pas une étape dans l’avancée inéluctable vers « l’utopie de la ville parfaitement gouvernée » que décrit Foucault, mais plutôt une réponse contingente à une menace récurrente. Le temps de la peste, qui apparaissait et disparaissait en réponse à des événements spécifiques, peut donc être considéré comme une saison.

EN:

This work examines the urban environment depicted by Leandro Bassano in his cycle of the Twelve Months during February and March, and the notable iconographic shift it presents with respect to the typical imagery of farming labours. Leandro represented the themes of Carnival in February and Lent in March, breaking up this otherwise agricultural calendar to introduce the division of time according to civic and religious rhythms. It is argued that this transformation in iconography occurred at the intersection of the reformed Roman Missal and the emergence of the commedia dell’arte. Finally, this article explores what the dialogic relationship between Leandro’s February and March conveys about the deeper cultural and seasonal experience of the Veneto city in the post-Tridentine context.

FR:

Cette étude examine l’environnement urbain dépeint par Leandro Bassano dans son cycle des douze mois, en se concentrant plus spécifiquement sur les mois de février et de mars et sur les changements iconographiques importants que ces derniers présentent par rapport à l’imagerie typique des travaux agricoles. Dans cette oeuvre, Leandro a associé le mois de février au thème du carnaval et le mois de mars à celui du carême, rompant ainsi avec l’orientation agricole qui caractérise le reste de ce calendrier, pour introduire une nouvelle division du temps obéissant à des rythmes civiques et religieux. La présente étude soutient que cette transformation de l’iconographie s’est produite de façon concomitante avec la réforme du Missel romain et avec l’émergence de la commedia dell’arte. Enfin, cet article analyse la relation dialogique qui s’esquisse entre la représentation que Leandro fait du mois de février et l’image qu’il donne du mois de mars, en se demandant ce que cette iconographie reflète plus généralement au sujet de l’expérience culturelle et saisonnière de la ville vénitienne dans le contexte post-tridentin.

EN:

Mayan and Andean medicine included empirical perspectives and botanical cures that were transmitted in the urban spaces of colonial Spanish America, spaces themselves built over former Amerindian cities. Mayan and Andean peoples, whose histories included development of both urban and rural aspects of civilization, brought their medical knowledge to the Hispanic cities of the colonial Americas. In these cities, despite the disapproval and persecution of the Inquisition, Native American medicine gradually became part of the dominant culture. As this article will demonstrate, Mayan and Andean medical knowledge was absorbed by the “new cities” that Imperial Spain constructed in the colonial Americas, church disapproval notwithstanding. Cities and urban space became prime conduits for the circulation and incorporation of Native American medical knowledge among the newer Hispanic and mestizo population in the colonial Americas.

FR:

La médecine maya et andine comprenait des approches empiriques et des remèdes à base de plantes qui furent transmis dans les espaces urbains de l’Amérique espagnole coloniale, des espaces qui avaient eux-mêmes remplacé la présence de cités autochtones plus anciennes. Les peuples mayas et andins – dont l’histoire comprend le développement d’aspects civilisationnels ayant trait à la fois à la vie rurale et à la vie urbaine – ont apporté leurs connaissances médicales dans les villes hispanophones des Amériques coloniales. Dans ces villes, malgré la condamnation que faisait peser l’Inquisition sur ces pratiques, soumises à la persécution, la médecine traditionnelle des populations autochtones s’est progressivement intégrée à la culture dominante. Comme le montre cet article, les connaissances médicales mayas et andines furent absorbées par les « villes nouvelles » construites par l’Espagne impériale dans les Amériques coloniales, en dépit de la désapprobation de l’Église. Les villes et l’espace urbain devinrent des canaux privilégiés de la circulation et de l’incorporation du savoir médical amérindien au sein de la nouvelle population hispanique et métisse des Amériques coloniales.